On attend le moment où elle sera au plus bas. On attend avec impatience le moment où elle aura atteint le fond.
On se rend compte qu’elle ne peut pas s’en sortir avant. Qu’il faut qu’elle descende au fond pour pouvoir remonter.
Elle s’épuise. Elle ne peut plus marcher. Elle ne peut plus aller au lycée. Juste pour aujourd’hui? Juste pour quelques jours? On ne sait pas. On attend….
Il va falloir prendre des décisions rapidement.
Hier matin ma fille était incapable d’aller en cours. Elle n’a pas arrêté de pleurer.
En quittant la maison, elle s’est effondrée. Je l’ai renvoyé au lit.
« Quand on est malade, on va voir le médecin qui te met en arrêt maladie. Tu es malade, donc tu va te coucher et te reposer ». Elle me répond que ce n’est pas pareil. Que chez elle cela ne se voit pas.
« Mais c’est bien pire ma chérie…. et il faut comprendre que le mal est le même, même si on ne le voit pas ».
Elle se couche, se repose et se sent mieux en fin de matinée pour aller voir Delphine, sa psy.
En arrivant, je demande à Delphine de lui parler. Elle me répond qu’elle va voir quand elle peut me donner un rendez-vous…. qu’il faut qu’elle voit ma fille d’abord.
Je laisse faire mais me dit qu’il est primordial qu’on se parle.
Finalement au bout d’une demie heure elle vient me chercher et me dit qu’effectivement il est important qu’on se parle (ah bon .., finalement je n’avais pas tort de lui faire cette demande ?)
Entre parenthèses, je comprends toutes les mamans dont je lis leur révolte contre les psys qui les prennent pour des mères hystériques et paranos … !! Même si j’apprécie énormément la psy de la fille, parfois j’ai l’impression qu’on me prend pour une imbécile débile.
Bref, elle me confirme que ma fille ne va pas bien. Qu’elle continue à perdre du poids, qu’elle est très triste et déprimée. Elle ne veut pas encore lui donner des antidépresseurs, mais n’attendra pas plus d’une semaine pour prendre la décision.
Elle évoque l’hospitalisation qui devient de plus en plus évident. Ma fille refuse, se révolte. JAMAIS je n’irai à la clinique…. Je VEUX m’en sortir autrement.
Elle évoque l’arrêt du lycée. Là aussi « IMPOSSIBLE », je DOIS aller à l’école. Mais je veux changer d’établissement. Je ne supporte plus l’ambiance, les gens.
Alors je lance quelques idées :
Changement de lycée :
Delphine est d’accord avec moi que ce changement est impératif. Mais on est également d’accord sur le fait qu’elle est trop faible et qu’il est impossible de la faire changer aujourd’hui. Il faut d’abord qu’elle reprenne des forces avant de pouvoir affronter un nouvel univers.
Je prends contact avec les lycées: un établissement proche de chez nous, et le lycée international de Sèvres.
Vivre à Bruxelles pendant quelques semaines :
Notre fille recherche la famille, les proches « de gezelligheid ». Elle ne peut pas rester à la maison seule car cela va la déprimer encore davantage.
Je lui propose d’aller passer quelque temps à Bruxelles.
Delphine trouve cela une excellente idée. Mais elle dit également qu’on peut essayer pendant 2 semaines. Et que s’il n’y a aucun changement pendant ces deux semaines, c’est retour à Paris et hospitalisation immédiate.
On en parle… on creuse les idées. On se revoit samedi pour en parler.
Peut être pourrait-elle aller chez mon frère et ma belle sœur? Ils habitent au calme, elle a son bureau à la maison…Elle est anglaise, très noir/blanc… (Ce qui changera du gris chez moi!!) Et puis, avec ses 3 garçons, elle n’est pas vite démonté par les émotions (mais elle doit quand même en encaisser beaucoup!). Et ma fille adore son oncle.
Ma fille pourrait l’aider au bureau, pourrait aller au bureau avec mon frère, pourrait également aller aider l’autre frère dans son club de sport… Elle pourrait passer les weekends avec ses grands parents, ou sa marraine, ou revenir à Paris…
Elle serait entourée, aimée.
Quand une amie m’a demandé hier soir comment moi je supporterai cette séparation, je lui ai répondu que c’est la meilleure chose qui pourrait nous arriver. Il n’y a pas un autre endroit au monde où je pourrais envoyer ma fille en toute sérénité.
Mais je ne sais pas encore si je peux imposer cette responsabilité à ma famille.
Et ce matin je pensais à une autre solution. J’ai téléphoné hier au lycée international de sèvres où ils auraient de la place. Mais la condition est d’être parfaite bilingue anglais/français.
Si ma fille va à Bruxelles, elle pourrait également suivre des cours d’anglais. Cela lui donnera l’impression de ne pas perdre son temps et lui donner un objectif pour la rentrée de janvier.
Bref, vous voyez que les choses avancent. Vite, car je n’ai même pas encore eu le temps d’en parler avec son père, avec ma belle sœur…
Tout se bouscule et c’est bien!!
Tout ce que nous pouvons faire, nous le ferons. C’est toi et ta fille qui déciderez. Notre maison et surtout nos cœurs sont ouverts pour elle.
Je me renseignerai tout de suite pour les cours d’anglais. C’est une excellente idée. Et le lycée international est très bien, parce que il ya une ouverture sur le monde.
Je t’embrasse très fort, ma grande fille. Tu es magnifique à l’intérieur et l’extérieur. Continue ta vie, tu es une maman et une femme formidable.
Publié par MdV
Tout ce que je peux te dire, avec mon expérience : ce n’est pas en fuyant qu’on affronte cette p** de maladie… mais en l’affrontant…… le changement de lycée, de lieu ne sont que des fuites….. Je vous encourage à travailler sur l’hospitalisation !!
Mais les conseilleurs ne sont pas les payeurs, je me suis retrouvée au même carrefour………
courage à vous tous
Publié par Maman contre l’anorexie
Je sais que la fuite n’est pas la solution. Le changement ne peut se faire que s’il y a un progrès chez elle. Un signe qui montre qu’elle avance, qu’elle stabilise. Tant qu’il n’y a pas de changement, tant qu’elle reste dans le même système, il est impossible d’envisager quelque changement que ce soit.
On est conscient que l’hospitalisation est incontournable. On cherche comment l’en convaincre, comment lui faire comprendre que c’est la seule solution. On peut prévoir des changements de lycée, un changement de pays, des voyages pour lui donner des perspectives… mais il faut un pas de son côté. Sans ce pas, on ne peut rien faire.
Elle vient de passer le déjeuner avec nous à table. Elle n’a rien mangé. Je lui ai dit que c’était maintenant et pas dans 2 heures. Que si c’était pour ne pas manger avec nous à table, il faudra qu’elle attende le goûter… ou le repas du soir.
C’est dur à dire, mais je ne peux pas me laisser manipuler. Je ne peux pas avoir pitié. Je ne peux pas la laisser dominer sur la vie de nous tous. Elle doit comprendre que ce n’est pas avec le chantage alimentaire, qu’elle obtiendra quelque chose.
Je sais qu’elle ne le fait pas consciemment. Mais je n’ai pas d’autre alternative.
Merci Nathalie pour tes mots toujours rassurants. Ils sont parfois difficiles, mais tellement réalistes. Tellement vrais.
Publié par Ma bataille contre l anorexie de ma fille