Autorisation de sortie

novembre 30th, 2009

Lorsque nous étions avec notre fille dimanche, elle a dit qu’on allait devoir rencontrer le Dr cette semaine pour parler d’une éventuelle sortie le weekend prochain.
Mon mari dit qu’il faut le prévenir à l’avance car il a un planning d’enfer cette semaine et qu’il ne peut pas s’organiser au pied levé…. Ma fille et moi sommes bouche bée et c’est ma fille qui lui dit « Papa, je ne vais pas moisir ici à l’hôpital jusqu’à ce que tu trouves le temps de venir en rendez-vous « . Ton travail est important mais moi je veux sortir d’ici ».
Voilà, c’est dit.

Le Dr m’a téléphoné lundi pour me dire qu’il peut nous voir vendredi afin de parler d’une sortie pour le weekend de notre fille.
Je lui dis que mon mari ne sera probablement pas disponible (il est à la chasse jeudi et vendredi!!!) compte tenu d’un agenda très chargé. Il me dit que si mon mari est d’accord, je peux venir seule et qu’il le verra en consultation ultérieurement.
Je lui demande comment elle va et comment elle a réagi après notre conversation de dimanche. Il me dit qu’elle veut rassurer tout le monde. Qu’elle en parle avec la psy et que bien évidement elle est assez choqué. Il me dit aussi qu’il y a un problème de communication entre son papa et elle (à part parler de la pluie et le beau temps, on ne va pas plus loin).
Je transmets cela à mon mari. Evidement il s’énerve, dit qu’il parle beaucoup avec notre fille, qu’il ne veut pas aborder de sujets trop lourds avec elle. Et le médecin  se prend pour qui ? De dire cela? Et puis de donner un rendez-vous à se courte échéance? Comment les parents peuvent s’organiser?
Je le laisse parler. Cela ne sert à rien que je réagisse. Il est convaincu d’avoir raison.
Un rendez-vous pour la sortie de sa fille ce weekend, un rendez-vous prévu 5 jours à l’avance… cela ne vaut pas une annulation de chasse?
Et puis, il m’annonce que le weekend il ne sera pas là non plus. Qu’il reviendra de la chasse dimanche matin…. Ma fille passera donc le weekend avec son frère et moi. Rien ne change. Rien n’aura changé. Et la maladie de ma fille aura juste servi à me faire prendre la décision de me séparer de son père.

Finalement, il me reproche de ne pas l’informer de mes contacts avec l’hôpital. Je lui dis que j’appelle l’hôpital tous les jours. Et puis j’écris aussi sur mon blog. Mais il ne me demande pas des nouvelles. Et il ne lit pas ce que j’écris (sa dernière connexion date de fin septembre). Il va téléphoner au médecin. Après tout, un rendez-vous peut très bien se faire par téléphone!
Il me rappelle après. Me dit que le médecin essayera de la voir mercredi. Qu’il n’est pas d’accord avec mon mari qui la trouve très déprimée. Qu’il trouve qu’il y a des progrès. Et puis, il lui dit qu’il doit parler avec notre fille de notre séparation.
Il n’a pas réussi à impressionner le médecin.
Et le médecin lui a dit ce qu’il pensait.

Souvenir de 2002

novembre 27th, 2009

Lorsque nous avons rencontré le psychiatre de ma fille, mon mari et moi avons parlé de notre propre adolescence. Deux histoires totalement différentes. La sienne, enfants unique, pension, relation houleuse avec le père… et pour finir une triste perte de sa maman. La mienne, 2 frères, jeunesse facile, adolescence « normale » et bien remplie, souvenirs merveilleux, beaucoup d’amour,  liens familiaux très forts et encore aujourd’hui un « clan » dont tous les membres sont très proches.
Le psy m’a demandé s’il n’était pas difficile pour moi de vivre la séparation avec ma fille compte tenu du fait qu’on soit tous tellement proches.
Pour moi, cela a été un soulagement de la savoir en sécurité à l’hôpital. Et je sais qu’on va se retrouver et que rien ne pourra casser notre relation.
Cette séparation, je la vis bien. J’ai le temps de souffler un peu, j’ai le temps de réfléchir. Et surtout, je sais que cette séparation est nécessaire afin que ma fille puisse prendre ses distances par rapport à moi.
Parfois je me demande même si il ne serait pas mieux qu’elle ne me voie pas du tout pendant quelques semaines. Pour se construire. Pour ne pas rester « accroché » à moi….

J’ai retrouvé une lettre que j’ai écrite le 4 mai 2002 lorsque son père, elle et moi avons consulté un psychiatre :

Nous sommes allés voir un psychiatre aujourd’hui, elle, son papa et moi… pour essayer de l’aider à se débarrasser de ses angoisses, de ses peurs, de son mal de vivre, parfois.
Pour tenter de la libérer un peu de moi, car elle est beaucoup trop dépendante.
Elle était inquiète, angoissée. Elle avait du mal à parler, par peur de fondre en larmes. Elle n’a pas cessée de me regarder, de chercher de l’assurance dans mon regards, de chercher mon approbation, peut être?
Le psy s’est adressé à elle uniquement. C’est bien. Il posait des questions appropriées, lui expliquait les choses en essayant de les transmettre dans son langage. Il lui dit qu’elle me regarde trop, qu’elle ne s’adresse pas à son papa. Qu’elle devrait essayer de répondre sans moi. C’est un premier pas vers une sorte de libération.
Mais quoi de plus normal qu’un enfant de 9 ans  qui s’adresse à sa maman, qui s’attache à sa maman parce que le papa n’est jamais vraiment présent?
Ensuite, il m’a demandé si elle me racontait beaucoup. Oui. Tout? Presque … Et à son papa? Hochement dubitatif de la tête. Est-ce que s’est ta maman qui te pose (t’oblige?) des questions ou est ce que c’est toi qui veut parler? Les deux !
Evidement qu’elle me parle beaucoup et que j’essaie de la pousser à s’exprimer. Il n’y a que comme ça que je peux la comprendre et l’aider. Ca me parait tellement essentiel de communiquer ensemble.
Est-ce que ton papa est sévère? Un peu… dans la moyenne… Elle n’ose pas en dire davantage.  Est-ce que ton papa te fait peur? Non… Non? Stupéfaction de ma part. Je ne dis rien. Je ne veux pas l’influencer. Mais elle a peut de dire la vérité. Un enfant qui n’a pas peur de son papa, ne se met pas à pleurer à la moindre remarque. Cet enfant n’a pas peur de venir dans la chambre de ses parents parce qu’il fait des cauchemars. Ma fille n’ose pas venir… elle me répète sans arrêt qu’elle a peur de venir dans notre chambre la nuit par peur que son papa se fâche et la renvoi sans sa chambre. Ce n’est pas une angoisse ça??
Le psy lui dit qu’il faudrait que son papa soit plus sévère. Plus sévère??? Je n’en crois pas mes oreilles. Elle a justement besoin d’être rassurée, de pouvoir parler avec lui, de jouer avec lui… tout simplement besoin de le voir et de nous voir bien ensemble. Ce n’est pas en étant maladroitement sévère qu’on résoudra quoi que se soit.
Il lui a dit qu’elle s’inquiète trop pour sa maman. Elle a du mal à comprendre que je suis une femme indépendante qui peut très bien se débrouiller toute seule. Mais elle n’a que connu le contraire à la maison. Une maman qui n’est pas respecté par son mari et qui est sans arrêt diminuée dans leurs yeux. Une maman qui essaie de compenser les absences de leur papa en donnant peut être un peu trop.
Ma fille se met à pleurer. Fort. Ca lui fait du mal d’entendre qu’il faut se séparer un peu de sa maman et peut être se rapprocher un peu plus de son papa. Il a raison. Tout à fait raison.
Mais comment se rapprocher se son papa si il n’est pas présent? S’il ne partage pas le quotidien avec nous? S’il continue à être absent comme il l’a été toutes ces années?
Ma pauvre petite fille. Ca me fait mal de sa voir secouée comme ça. Mais je suis contente que les choses aient été dites.

Je sors de ce rendez-vous avec l’impression d’être une mère envahissante, presque tyrannique…. Pourtant je ne rêve que d’une famille unie. Je rêve d’avoir un mari présent et un père pour les enfants. Je veux que mes enfants soient indépendants, qu’ils puissent s’épanouir et avoir une adolescence heureuse.  Mais si je ne m’en occupe pas, qui va le faire?

Décision de couple

novembre 23rd, 2009

Nous allons à la messe pour le décès du papa d’une amie proche. En principe je dois diner avec mon mari après. Pour parler. Je n’ai pas dormi cette nuit. Une nuit blanche complète. Car je dois lui annoncer que je vais me séparer de lui.
Il m’appelle lorsque je suis dans la voiture pour aller à la messe. « Ne m’en veux pas mais je préfère remettre notre diner à plus tard. J’ai mal à la tête, une grosse migraine et nous avons des choses importantes à aborder. Tu n’as pas dormi cette nuit, donc c’est mieux de se voir un autre jour ». Cela fait des semaines que j’essaie de parler, mais qu’on ne trouve pas de moment. J’insiste. On se verra mardi alors.

Je vais boire un verre car je suis trop tôt. Il me rejoint pendant quelques minutes. S’installe à ma table. Je lui dis que je vais le quitter. Tant pis que ce n’est pas l’endroit ni le moment. Je lui dis qu’il y a deux choix : soit je pars à Bruxelles avec les enfants après noël, soit il quitte la maison et je m’occupe de la retaper et la mettre en vente.
Il sent que je suis sérieuse. Me dit qu’il m’interdit d’aller à Bruxelles, que je ne peux pas le mettre hors de la maison, que ce n’est pas le moment pour notre fille et qu’il est d’accord sur le principe de divorcer….
Que des contradictions.
Je lui réponds qu’il ne peut pas m’interdire quoi que ce soit. Que je fais aussi ce que je veux. Que je ne vis pas dans une prison et qu’il ne me fait plus peur avec ses menaces.
Que s’il ne veut pas parler, on passera par les avocats.

Ma fille

novembre 23rd, 2009

Photos du 22 novembre : malgré son chagrin, elle toujours aussi belle, beaucoup plus sereine… et toujours prête à faire le pitre.
Elle reste lucide et parfois elle se dit qu’elle est dans un asile psychiatrique … ce qui serait le cas si elle avait plus de 18 ans!

Gros coup de blues

novembre 23rd, 2009

Je ne sais pas pourquoi je me sentais mal samedi. J’étais fatiguée, démoralisée, me suis occupée dans le jardin pour me changer les idées.
Dimanche matin j’attendais avec impatience de pouvoir aller à l’hôpital. Et a 1 heure précise je suis sortie de l’ascenseur, j’ai vu ma fille qui m’attendais et qui s’est jeté dans mes bras. Le temps était trop long. Elle avait besoin d’un ENORME câlin.
La journée de samedi et dimanche matin ont été trop difficiles. Elle avait besoin de nous voir, avait envie d’être proche de nous. Est-ce que j’ai pu ressentir ça?

La cause de ce coup de blues n’est pas la prise de poids. Elle en prend lentement mais surement. C’est surtout le changement dans les patients au niveau de son service. Le service pédiatrie est complet, donc certains enfants ont été transférés dans le service des ados. Avec des pleurs toute la nuit, des mamans qui mangent les croissants qui étaient destinés aux ados, avec des infirmières surmenés et qui ont moins de temps, moins de patience.
Et puis surtout, d’autres ados qui ont rejoint le service. Essentiellement des jeunes qui ont fait des tentatives de suicide, dont une qui a eu une grande dispute avec sa maman dans la chambre de ma fille. Une maman qui a giflé sa fille, qui lui a dit des horreurs. Des choses que ma fille ne pouvait même pas s’imaginer. La maman a été rapidement évacuée du service? Mais dimanche matin, la jeune fille a fugué de l’hôpital…. Notre fille était bouleversée. A demandé à plusieurs reprises si on l’avait retrouvé. Ce qui a été le cas dimanche soir, mais on ne sait pas dans quel état et ont ne sait pas où elle est.

Ma fille a pleuré beaucoup. Elle sait maintenant qu’elle ne veut pas rester à l’hôpital. Qu’elle veut en sortir rapidement. Mais que son problème psychologique n’est pas réglé. Et que tant que cela ne sera pas fait, elle ne sera pas capable de sortir.

Elle a écrit dans notre cahier pour la première fois depuis le mois de septembre. Elle a vidé tout ce qu’elle avait sur le cœur. Ça lui a fait du bien, mais en même temps elle me dit qu’elle a écrite des choses dont elle n’ose pas parler. Ni avec moi, ni avec les médecins. Elle me demande si elle peut le faire lire à la psychologue, ou si elle peut en parler. Je la rassure et lui dit qu’il est important de dire les choses, d’en parler avec l’équipe médicale. Que c’est seulement comme ça qu’elle pourra s’en sortir.

Je lui ai lu une lettre que j’ai écrite en 2002 lorsque son père et moi l’avions emmené voir un psy car elle avait énormément d’angoisses. En écoutant mes mots elle se rend compte que rien à changé… à part le fait qu’elle n’a plus peur de son père.
Et moi, je vois que rien n’a changé. Qu’il est temps de réagir.

Elle a reçu des lettres, des cadeaux, des dvd et en est ravie. Son médecin trouve que sa chambre devient trop encombrée… trop « cosy ». Avec des photos au mur, un panneau fait par ses amies, ses coussins, ses doudous… la chambre est agréable et elle s’y sent bien.
Mais elle est heureuse qu’on pense à elle. Heureuse de savoir qu’elle est « quelqu’un ». Ce sentiment d’être plus rien la quitte petit à petit.

Elle demande si elle pourra voir ses amies bientôt. Me dit qu’il faut insister auprès du médecin. Même pour 1 heure.
Elle demande également de voir une nutritionniste pour l’aider.

Il y a du progrès malgré tout. Et peut être que ce coup de blues est bénéfique car cela lui permet de voir qu’elle veut sortir de là et que finalement ce n’est pas un cocon aussi agréable qu’elle le pensait.

 

Profitez de l’absence de votre fille pour régler vos problèmes …

novembre 19th, 2009

Voilà ce qui sort de notre entretien avec le psychiatre et la psychologue de notre fille.
Nous avons eu une longue conversation….  Et je pense que ce que j’ai dit, n’a vraiment pas plu à mon mari. Mais cela dure depuis trop longtemps. Il faut avancer maintenant. Pour nous, pour nos enfants.

L’équipe médicale est très optimiste quant à notre fille. Elle fait de grands progrès au niveau de son poids, est très gentille avec toute l’équipe médicale, est positive, s’intéresse aux autres, aux activités… Elle se sent bien dans cet environnement.
D’ailleurs, le monde extérieur et le futur lui font toujours aussi peur.
Mais les médecins la rassurant, on la rassure. D’abord, elle ne quittera l’hôpital que si elle en est psychologiquement et physiquement préparée. Ensuite, je la rassure qu’elle ne reprendra pas ses cours avant janvier.
C’est des phrases qu’elle a besoin d’entendre à plusieurs reprises lors de nos visites. Ce qui indique que malgré son apparence, elle est encore bien malade.
D’ailleurs, elle aurait la possibilité de téléphoner aux amis quand nous sommes avec elle. D’autres patients (ceux qui ont fait des tentatives de suicide….) lui proposent de prêter leur téléphone pour aller sur facebook. Mais elle refuse. Elle me dit que si les médecins interdisent toute communication avec l’extérieur, c’est que cela doit être mieux pour elle… Et je sens qu’elle ne veut pas communiquer avec les autres, ni les voir. Elle a vraiment besoin de rester seule et ne veut voir que son papa et sa maman.

Hier, elle m’a longuement parlé des autres patients du service. Il y a un « turnover » très varié…. :    toujours les 3 filles anorexiques, dont une sous sonde (le père est alcoolique dépressif) et une autre qui a un grave problème mental (attouchements et violence par le père, entre autres).
Ensuite, 2 patientes hospitalisés pour cause de tentative de suicide : l’une a été violé par le meilleur copain de son petit ami (17 ans), l’autre a été séquestré par son père pendant toute sa jeunesse avec violences et interdiction d’avoir des contacts avec le monde extérieur. La fille a 15 ans, en paraît 10 et ne sait ni lire, ni écrire.
Et puis, il y en a deux (garçons!) pour des raisons purement médicales (diabète et problème d’immunité).

Ce n’est pas un récit très réjouissant, mais ma fille me dit que jamais elle n’aurait connu des personnes pareilles si elle n’avait pas été hospitalisée. Qu’elle entend des horreurs et que cela lui permet d’être plus à l’écoute des autres, de moins juger, de se rendre compte qu’il y a nettement pire qu’elle….

Est-ce que j’avais déjà dit que son poids de sortie est fixé à 48 kilos? Beaucoup trop peu à mon goût mais je suppose que les médecins savent ce qu’ils font.
Toujours pas de nouvelles de sa psychiatre Delphine. L’équipe médicale à Poissy n’en a pas non plus…. Ma fille est très déçue, et moi encore plus.

Une semaine à l’hôpital

novembre 16th, 2009

On a pu la visiter hier. Son papa et moi sommes resté toute l’après midi. Il est arrivé une demi-heure avant moi et parti une heure avant moi. Comme ça, nous avons pu passer chacun un peu de temps seul avec elle.

Elle va bien. Moralement en tout cas, elle est beaucoup plus détendue, beaucoup plus positive.
Au niveau du poids, c’est très moyen. Elle a pris 800 grammes dans la semaine, mais perdue 100 grammes samedi… ce qui l’a affolé car elle craint beaucoup la sonde.
On a mis la sonde à sa copine jeudi dernier. Ma fille y a échappé de justesse.
Mais voir l’autre fille avec cette sonde lui fait peur : « Quand je pense qu’il y a 1500 calories qui passent par le nez et qu’en plus elle doit manger, je préfère goûter ce que je mange!! » Et oui, ma fille aime manger, aime cuisiner, aime la nourriture. Mais elle en a peur car elle pense ne pas pouvoir se contrôler, pense qu’elle va trop manger et ne pas savoir où s’arrêter.

Les 100 grammes qu’elle a pris, l’ont réveillé. Elle commençait à se dire qu’elle pouvait prendre du poids en ne mangeant que la moitié des repas. Et elle se rend compte que ce n’est pas possible. Du coup, elle fini tout son plateau. A mal au ventre après. Mais ne peut pas faire d’exercice, ne pas sortir. Alors elle fait des aller retour dans le couloir, du sur place dans sa chambre.

Elle voit un médecin tous les jours avec qui elle s’entend très bien. Les infirmières sont adorables. Elle n’a vu la psy qu’une seule fois. Pas de nutritionniste, pas de kiné… finalement beaucoup moins de soins qu’à l’extérieur.

Elle était ravie d’avoir des nouvelles de tout le monde. Ravie d’avoir des lettres de ces amies. Rassuré qu’on pense à elle. Elle,  qui pensait que plus personne ne voulait la voir, que personne ne tenait à elle….

Son papa lui a acheté un ordinateur portable. Trop contente, ma fille!
J’ai transféré toutes les photos, musique et données de son ordinateur et cela va l’occuper quelque temps. Rien que faire le ménage dans les milliers de photos va lui prendre pas mal de temps. Je lui ai donné des CD vierges pour mettre les photos qu’elle sélectionnera pour faire imprimer. Et ensuite, elle pourra faire l’album que je lui ai acheté…

Elle parle beaucoup de sa sortie. Se rend compte que ce ne sera pas aussi vite que prévu. Est rassuré quand je lui dis qu’elle ne retournera pas au lycée avant janvier, qu’il lui faudra de temps une fois sortie de l’hôpital.

Pourtant, malgré sa bonne humeur et son état physique nettement meilleur, on voit qu’elle est encore loin d’être guérie… Qu’il va encore falloir du temps.
Mais tout est encourageant. Et puis… c’est elle « la moins atteinte » de tout le service…
(ce qui est un peu vrai… mais au royaume des aveugles les borgnes sont roi, n’est ce pas!)

On voit le pédiatre demain soir pour premier entretien depuis son hospitalisation.

 

Soulagement

novembre 12th, 2009

Un énorme poids est tombé hier. Une énorme angoisse a disparu. Une nuit enfin sereine pour tous.
C’était avec la peur au ventre qu’on s’est rendu à l’hôpital hier. Comment allait-elle réagir? Est-ce qu’elle allait vouloir nous voir? Avait-elle mangé?
On est rentré dans le couloir du service adolescents chargés de sacs : couverture, doudous, PSP, DS, lecteur vidéo, livres, magazines, liseur de cheveux, papier à lettre, enveloppes, photos…. toute la liste qu’elle nous avait donné par l’intermédiaire de l’infirmière était dans ces sacs.

Elle m’a vu à travers la porte de la salle commune. S’est levé avec un grand sourire et s’est jeté dans mes bras. Un instant magique, un moment tellement espéré mais tellement inattendu. Elle est allée dans les bras de son papa, et on comprend qu’elle va bien.

Visite de sa chambre, présentation de ses amies, compte rendu de sa journée, des repas, des maladies de chacun… Elle était de bonne humeur, même joyeuse, lucide, ouverte : j’ai retrouvé ma fille telle que la connait : combattante, critique, active, affectueuse…

Elle prend des nouvelles de tout le monde. Veut écrire à tous. Veut recevoir du courrier, des petits objets qui la font penser à chacun.

Elle nous décrit la situation des autres : 3 filles anorexiques (dans un état bien pire qu’elle …sic), 2 patients suicidaires, une fille diabète. Ils viennent et partent. Ils parlent beaucoup. Elle a été accueillie par les autres qui sont tout de suite venu vers elle.

Elle déteste le pédiatre. Je l’adore. Je lui serais éternellement reconnaissant pour ce qu’il a fait.

Évidement, les journées sont longues. Elles s’ennuient, mais trouvent du temps pour regarder la télé, lire, manger ensemble, parler, bricoler, avoir un soutien scolaire.
Elle demande ses cours mais est rassuré par la position de l’école que j’ai rencontrée lundi. Elle sait maintenant qu’elle n’a pas de soucis à se faire pour sa scolarité, qu’on l’aidera à passer son année.

On fait un tour à l’extérieur, ce qui lui fait du bien. Elle n’a plus froid.

On a hâte de la revoir dimanche et on reviendra avec toutes les choses qu’elle a demandé : une télévision (il n’y en a qu’une dans tout le service), des posters, des photos, un oreiller, des vêtements « normaux », ….. La liste est longue, mais qu’importe.

Elle a écrite une longue lettre à son frère. Une lettre pleine de tendresse, de volonté, de lucidité.
Elle veut écrire aux autres… par courrier, car email et téléphone sont inexistants.

 

Sa journée en quelques mots :

Réveil à 8 heures : interdiction de sortir du lit avant prise de tension.
Pesée
Reprise de tension
Petit déjeuner (pas assez à son goût!)
Psychologue (2 fois par semaine)
Médecin
Déjeuner à 12 heures : au choix. Pas d’obligation de manger. On vérifie juste à la fin ce qu’elles ont pris.
14 heures : soutien scolaire avec professeurs externes. Matières selon son envie.

16 heures : goûter

Visite des « chemises roses » ; des volontaires qui viennent faire du bricolage avec eux.

18 heures : diner

Il reste beaucoup de temps « libre », beaucoup de temps pour « s’ennuyer », chose très importante pour « soigner » la maladie.

Elle a pris 500 grammes et remange du pain et des féculants. Elle fait tout pour ne pas avoir la sonde aujourd’hui. Elle est gentille avec le personnel car elle a compris que c’est la seule façon de pouvoir sortir au plus vite.
Elle calcule combien de temps elle devra rester : 500 grammes en 3 jours. 5 kilos en 30 jours. Elle pense pouvoir faire « mieux » et réduire le temps qu’elle restera. Il faut qu’elle prenne 6 kilos avant de sortir et a conscience qu’elle devra en prendre minimum 12 pour guérir complètement.

Une prise de conscience qui va durer? Difficile à dire car la maladie est tellement perverse. On ne sait pas dans quelle mesure elles veulent donner une bonne impression, regrossir rapidement pour sortir…et ensuite recommencer.

Mais on est positif, optimiste. Et on verra ce que l’avenir dira.

J + 1

novembre 10th, 2009

C’est la première journée depuis 2 mois que je n’ai pas peur. C’est la première journée où j’arrive à respirer normalement, où je ne regarde pas mon téléphone toutes les 2 minutes, où je ne me demande pas dans quel état je vais retrouver ma fille, ce qu’il faudra faire à manger, à quelle heure on doit aller en consultation….

C’est un soulagement de la savoir à l’hôpital. C’est rassurant, même si je ne peux pas la voir, lui parler. J’ai aussi besoin de quelques jours pour revenir à mes esprits.

J’ai eu le médecin hier soir en ligne. Il répond de suite, me donne immédiatement des nouvelles (j’en ai toujours pas de la part de sa psychiatre !!!).
Elle s’est calmé 20 minutes après notre départ. N’est pas resté dans sa chambre et a rejoint les autres jeunes filles présentes dans le service.
Moralement, il semblerai que ça va. Au niveau de l’alimentation c’est très difficile.
Le médecin lui donne jusqu’à jeudi pour manger. Si non, ce sera la sonde.
Je croise les doigts pour qu’elle y arrive.

Il m’a dit qu’on peut venir la voir mercredi et le weekend. Uniquement les parents et pas plus d’une heure. Si elle ne veut pas nous voir, il me rappelle. Si non, on verra sur place.
C’est beaucoup plus humain comme approche, et même si elle ne veut pas nous voir, le simple fait de savoir qu’on peut y aller est terriblement rassurant.
On peut téléphoner le service quand on veut. Pas de coupure totale comme c’est le cas ailleurs. Espérons que cela soit efficace.

Pour l’instant, l’hospitalisation sera de minimum 4 semaines avec une prise de poids de 5 kilos. Tout dépendra d’elle maintenant.

Journée noire

novembre 9th, 2009

Je reste sans mots, sans voix. J’ai pu crier, j’ai pu pleurer. Maintenant, c’est le vide.

Ma fille est à l’hôpital. On lui a appris son hospitalisation ce matin 15 minutes avant de partir. Elle savait que ça allait arriver. Mais elle s’est renfermée encore plus. Elle a fait une crise, elle a hurlé, c’était inévitable.

J’ai fait sa valise. Elle a fait sa valise. Elle ne voulait pas d’aide.
Finalement elle est descendue, elle est allée dans la voiture. Seule, en pleurant. Elle ne voulait pas que sa marraine l’accompagne. Elle voulait être seule avec moi. Sans le dire.
Elle m’adresse plus la parole, m’ignore, siffle entre les dents de la laisser tranquille.

« Adieu Aston, je vais à l’hôpital pour mourir… » Voilà les derniers mots qu’elle a dit en quittant la maison.

Dans la  voiture elle pleure, mais elle est calme. Elle prend ses affaires en arrivant à l’hôpital. Me suit, me tourne le dos et ne veut plus me voir.
On attend, son papa n’étant pas encore là. Elle recommence à pleurer, veux venir dans mes bras. Mais le téléphone sonne. C’est son papa… elle se referme avant même que j’ai pu la prendre. Elle remet le masque.
Je fais les papiers d’admission. Son papa arrive mais elle ne veut pas le voir.
Il voit le médecin. Et on part.

Elle a une chambre seule, mais ils vont la mettre avec une jeune fille qui est rentré hier pour les mêmes raisons.

Je ne sais pas quand je vais la revoir. Je ne sais pas quand elle voudra me revoir.

J’ai téléphoné à sa psy pour lui annoncer la nouvelle sur sa messagerie. Depuis 2 heures je reste sans réponse… Quel soutien!

 

 L’hôpital … et après?

L’hôpital est une étape incontournable. Mais il faut prévoir la suite. Ellene pourra pas revenir à la maison. Retournerau lycée. Revenir sans cette famille qui n’en est plus une.
Je vais partir. Je vais emmener mes enfants à Bruxelles.
Je dois m’organiser maintenant. On a trop soufferts. On a trop vécu… ou pas vécu.
Je vais faire beaucoup de mal. Mais je dois créer une rupture. Je dois offrir à mes enfants une autre vie, donner d’autres perspectives.
Il faut un changement radical. Même temporaire.

Il n’y a pas de responsable, pas de reproches à faire. On a essayé. On n’y est pas arrivé malgré toute la volonté du monde.
Je ne veux pas faire mal. J’ai peur du changement. Mais rester serait une erreur.
On le sait depuis longtemps. On ne veut pas l’avouer.
Il y a 20 ans, le mur de Berlin est tombé. Aujourd’hui c’est moi qui casse notre mur.