Voilà la phrase que ma fille me dit régulièrement quand elle est « en crise ». Et malgré l’hospitalisation, malgré les suivis psychologiques, malgré toutes nos discussions, cette phrase revient tout le temps.
Non, je ne peux pas comprendre. Mais je vois sa détresse et je comprends qu’elle souffre énormément. Je comprends qu’elle ne va pas bien. Je comprends qu’il est plus facile de rester dans la maladie que d’en sortir. Je comprends que l’avenir lui fasse peur. Je comprends que faire des efforts est fatiguant. Je comprends qu’elle voudrait trouver un amour. Je comprends qu’elle souffre de la situation de ses parents… mais je ne peux pas en faire davantage. Je ne peux pas me glisser dans sa peau. Je ne peux pas vivre pour elle.
Nous avons vu le médecin à l’hôpital aujourd’hui. Elle a pris un peu de poids et ça la stresse. Elle ne veut pas prendre de poids et elle ne veut pas rester malade. C’est LA grande contradiction de cette maladie. Mais je pense qu’au fond d’elle, elle ne veut pas grossir, mais elle veut guérir ce sentiment épouvantable qu’elle éprouve en permanence. De penser en permanence aux repas. C’est une obsession et un grand stress.
Ce soir elle ne va pas bien. Elle pleure. M’explique ces sentiments contradictoires.
En revenant de l’hôpital, son papa m’a téléphoné dans la voiture. Il s’est plaint car il a mal aux dents. C’est vrai que c’est épouvantable. Je l’ai écouté pendant 5 minutes se plaindre, me dire qu’il allait rentrer de mauvais humeur etc. etc.
Ma fille n’a pas compris pourquoi je ne l’ai pas envoyé se plaindre ailleurs.
Entendre cette conversation et voir que je ne réagisse pas, l’a beaucoup énervé.
Je me suis fâché. Je lui dis que même si je vais me séparer de son papa, je n’ai pas de leçons à prendre ni de ma fille, ni de son père, ni de mon fils, ni de personne d’autre. Je fais ce que je Veux, comme je Peux! Je ne vais pas devenir méchante ou différente à cause de cette séparation (enfin, pour l’instant….).
Je ne lui dis pas que Je suis juste indifférente.
Elle se renferme, ne me parle plus.
Tant pis.
Le médecin a trouvé que le principe de passer des vacances séparé avec moi et son papa est intéressant et pas une mauvaise décision. Enfin quelque chose qui me rassure!
Il m’a également demandé de revoir la psychiatre Delphine, ce qui n’enchante ni ma fille, ni moi. Jamais elle ne m’a rappelé. Jamais elle ne m’a demandé des nouvelles. Et jamais elle a pris des nouvelles via le médecin.
Je ne vois vraiment pas pourquoi la revoir. Mais ça, je ne le dit pas à ma fille. C’est à elle de décider. Donc j’ai laissé un message pour prendre rdv.
Il me donne également les coordonnées d’une autre psychiatre, plus proche de chez nous. J’espère qu’elle sera bien…. Et qu’elle commence à me rappeler pour proposer un rdv!
Là, elle est dans sa chambre. Elle pleure et je sais qu’elle veut être dans mes bras. Qu’elle veut être rassurée. Mais je résiste, car il faut qu’elle voie qu’elle n’est plus une petite fille. Il faut qu’elle arrive à se détacher de moi. Tant pis, si cela passe par des colères et un rejet.
Si demain soir elle peut sortir en boite avec ses amis ou aller au Queen avec son père (…!! ) il faut également qu’elle se prenne en main. Je ne serais pas là pour prendre sa main et pour la rassurer.
Même si cela est un sentiment atroce qui est tellement contraire à ce qu’on voudrait faire en tant que maman.