« Arrêtes! Tu ne comprends rien »

décembre 17th, 2009

Voilà la phrase que ma fille me dit régulièrement quand elle est « en crise ». Et malgré l’hospitalisation, malgré les suivis psychologiques, malgré toutes nos discussions, cette phrase revient tout le temps.
Non, je ne peux pas comprendre. Mais je vois sa détresse et je comprends qu’elle souffre énormément. Je comprends qu’elle ne va pas bien. Je comprends qu’il est plus facile de rester dans la maladie que d’en sortir. Je comprends que l’avenir lui fasse peur. Je comprends que faire des efforts est fatiguant. Je comprends qu’elle voudrait trouver un amour. Je comprends qu’elle souffre de la situation de ses parents… mais je ne peux pas en faire davantage. Je ne peux pas me glisser dans sa peau. Je ne peux pas vivre pour elle.

Nous avons vu le médecin à l’hôpital aujourd’hui. Elle a pris un peu de poids et ça la stresse. Elle ne veut pas prendre de poids et elle ne veut pas rester malade. C’est LA grande contradiction de cette maladie. Mais je pense qu’au fond d’elle, elle ne veut pas grossir, mais elle veut guérir ce sentiment épouvantable qu’elle éprouve en permanence. De penser en permanence aux repas. C’est une obsession et  un grand stress.

Ce soir elle ne va pas bien. Elle pleure. M’explique ces sentiments contradictoires.
En revenant de l’hôpital, son papa m’a téléphoné dans la voiture. Il s’est plaint car il a mal aux dents. C’est vrai que c’est épouvantable. Je l’ai écouté pendant 5 minutes se plaindre, me dire qu’il allait rentrer de mauvais humeur etc. etc.
Ma fille n’a pas compris pourquoi je ne l’ai pas envoyé se plaindre ailleurs.
Entendre cette conversation et voir que je ne réagisse pas, l’a beaucoup énervé.

Je me suis fâché. Je lui dis que même si je vais me séparer de son papa, je n’ai pas de leçons à prendre ni de ma fille, ni de son père, ni de mon fils, ni de personne d’autre. Je fais ce que je Veux, comme je Peux! Je ne vais pas devenir méchante ou différente à cause de cette séparation (enfin, pour l’instant….).
Je ne lui dis pas que Je suis juste indifférente.

Elle se renferme, ne me parle plus.
Tant pis.

Le médecin a trouvé que le principe de passer des vacances séparé avec moi et son papa est intéressant et pas une mauvaise décision. Enfin quelque chose qui me rassure!
Il m’a également demandé de revoir la psychiatre Delphine, ce qui n’enchante ni ma fille, ni moi. Jamais elle ne m’a rappelé. Jamais elle ne m’a demandé des nouvelles. Et jamais elle a pris des nouvelles via le médecin.
Je ne vois vraiment pas pourquoi la revoir. Mais ça, je ne le dit pas à ma fille. C’est à elle de décider. Donc j’ai laissé un message pour prendre rdv.
Il me donne également les coordonnées d’une autre psychiatre, plus proche de chez nous. J’espère qu’elle sera bien…. Et qu’elle commence à me rappeler pour proposer un rdv!

Là, elle est dans sa chambre. Elle pleure et je sais qu’elle veut être dans mes bras. Qu’elle veut être rassurée. Mais je résiste, car il faut qu’elle voie qu’elle n’est plus une petite fille. Il faut qu’elle arrive à se détacher de moi. Tant pis, si cela passe par des colères et un rejet.

Si demain soir elle peut sortir en boite avec ses amis ou aller au Queen avec son père (…!! ) il faut également qu’elle se prenne en main. Je ne serais pas là pour prendre sa main et pour la rassurer.
Même si cela est un sentiment atroce qui est tellement contraire à ce qu’on voudrait faire en tant que maman.

 

Une bataille de gagné… mais ce n’est pas fini

décembre 15th, 2009

La semaine dernière Nathalie écrivait dans son blog que cette maladie est également une prison pour la famille. « La famille est aussi une marionnette de la maladie …
La peur que j’avais à la sortie de l’hôpital n’était pas sans raison.
Vendredi, je suis allé la chercher pour la ramener à la maison. A mon arrivée, elle était ravie, contente de sortir. Une fois dans la voiture elle à pleurer jusqu’à la maison. Sans que je puisse comprendre. La peur de rentrer? La peur d’être déçue? La peur de retrouver le lycée? La peur d’affronter « la vie »? C’est probablement un mélange de tout.

Une fois à la maison, elle s’est calmée. Etait contente de retrouver son frère et son chien. Sa chambre, ses messages sur facebook et sur son téléphone.

Samedi, elle est partie toute la journée avec son papa à Paris. Rentré à 20 heures… Beaucoup trop tard à mon gout compte tenu de son état de faiblesse. Mais elle était ravie de sa journée, à très mangé au restaurant pour le déjeuner, pour le goûter.

Le lendemain j’avais prévu d’aller au marché de Noel à Paris, avec mes enfants, des amies et leurs mamans. Mais samedi soir je savais déjà que cela n’allait pas être possible.
Dimanche fin de matinée : ma fille se renferme. L’escargot revient. Elle pleure, se met dans un coin, toute recroquevillé, ne parle plus, ne communique plus, ne regardes plus.
« Ca ne va pas ». « Tu ne peux pas comprendre ». « Laisses moi tranquille ».

Je la laisse. C’est du déjà vu. Elle doit être très fatiguée. Très stressé pour le lycée. Elle aurait du commencer lundi, mais elle refuse. Demande d’y aller que mardi matin pour la matinée.

La journée est horrible. Je suis perdue. Je m’occupe de mon fils toute la journée car il a beaucoup de travail pour l’école.
Les repas se passent bien. Mais le moral est à zéro.
L’après midi son papa lui propose d’aller au marché de noël…. Et elle y va avec lui. Je suis contente, car ça la fait sortir.
Aurais-je finalement du l’emmener le matin au marché? Aurais-je du ignorer sa fatigue?  Finalement, je me dis que c’est comme ça. Que maintenant il faut que j’avance et que j’arrête de me poser trop de questions. Je fais tout ce que je peux. Je ne peux pas en faire plus. Et puis, il faut que je pense à moi. Finalement, je ne peux pas vivre pour mes enfants.

Dimanche soir, elle était couché parterre dans un coin de mon bureau. Dans le plaid qu’à donné sa grand mère. Mon petit escargot. Je la soulève et la porte dans mes bras jusqu’à mon lit. Elle est légère. Elle veut que je reste avec elle. Elle veut juste des câlins, des bras. Elle ne veut pas grandir. Veut rester la petite fille.
Je la rassure, lui parle.
Je la fait venir pour le diner. A table, on décide que les enfants partiront avec leur papa à Cannes pour le nouvel an. A trois. Les enfants s’inquiètent pour moi. Il ne faut pas. Je suis heureuse de passer un peu de temps tout seule. Et eux ont besoin d’être avec leur père. C’est la seule façon de les rapprocher. De lui faire faire des choses avec eux, et rien que pour eux. Et de montrer que je ne vais pas faire marcher arrière. Encore.
Les fêtes cette année ce sera séparé. Et tant pis si cela ne convient pas tout le monde.

Je me couche dimanche soir. Epuisée. Et pas du tout sereine.

Lundi… Changement complète. Elle est de bon humeur. Je reste avec elle le matin car elle ne va pas au lycée. Finalement, je prépare un plat pour le déjeuner car je dois aller travailler. Elle devra manger seule.

Mais tout se passe bien.

Je sens que ça ne va pas être simple!! Mon pressentiment est bien confirmé. Les hauts, les bas, la déprime… elle n’est pas encore guérie. Même si elle mange!

SORTIE AUJOURD’HUI !!!!

décembre 11th, 2009

L’hôpital vient de m’appeler : on peut aller chercher notre fille cet après midi pour sortie définitive!!!!
Quelle bonne nouvelle. Quel bonheur.
Elle doit être tellement impatiente de rentrer.

On est soulagés, heureux.

 

 

Sortie dans 400 grammes

décembre 11th, 2009

Mercredi après midi, visite à notre fille. Les jours sont beaucoup plus longs depuis qu’elle est repartie dimanche dernier. C’est comme donner un petit avant goût et l’enlever après…
Elle allait très bien. Finalement elle avait perdue 300 grammes le weekend à la maison. Cela l’a rassuré dans la mesure où elle sait qu’elle peut manger davantage sans culpabiliser. Elle constate aussi que les consultations avec une nutritionniste après sa sortie sont probablement inutiles. C’est surtout une aide psychologique qu’il lui faudra.

Elle fait des projets. Samedi shopping avec son père dans Paris. Dimanche, peut être visite du marché de Noel à Paris avec copine et mamans. Elle veut aller à Cannes pour le nouvel an. Son papa lui a proposé d’y aller. Suis contente que les enfants  aillent passer quelques jours seuls avec leur père. Et puis moi, je passerai peut être noël avec eux à Bruxelles. A condition qu’il soit d’accord…

Le médecin souhaite que notre fille aille à l’école dès la semaine prochaine. Mi-temps peut être avec un soutien à domicile ou à l’école? Je suis en contact avec la directrice pour faire un « plan d’attaque »!

Évidement, je suis heureuse que ma fille sorte enfin de l’hôpital. Elle devra encore prendre 10 kilos car son poids de sortie n’est que 48 kilos. Elle est encore très maigre, très pâle et ne donne pas l’image de quelqu’un qui est guérie. Mais elle est souriante, jolie, sereine… ce qui est beaucoup plus important que tout le reste.
Mais je suis aussi angoissée et inquiète. Est-ce qu’elle va me demander la même attention qu’avant? Est-ce qu’il va falloir qu’on soit occupé en permanence avec elle? Est-ce que la vie de famille ne va que tourner autour d’elle?
Est-ce que la situation familiale ne pas la perturber? Est-ce qu’elle va être le porte parole de son papa pour me faire passer les messages… ce qui a déjà commencé à l’hôpital mercredi et est fait systématiquement dès que nous avons des soucis de couple.
On ne peut pas se permettre de la mettre entre nous. On ne peut pas se permettre de lui faire faire des choix. Elle ne le veut pas. Elle nous demande de parler ensemble et de prendre les décisions ensemble, sans tenir compte d’elle. Après, les enfants diront ce qu’ils en pensent et ce qu’ils veulent faire. Mais il faut absolument que chacun joue son rôle et reste à sa place: celui de papa, de maman, de fille, de fils, de frère et de sœur.


Weekend à la maison

décembre 7th, 2009

Samedi matin, je suis allé chercher ma fille à l’hôpital. Elle avait demandé d’être là à 8h45, car elle avait hâte de sortir.
On est rentré. Elle a retrouvé son frère, son chien. Tellement émouvant.
Elle a tout de suite ouvert le calendrier de l’avant, et a partagé un chocolat avec son frère. Spontanément, sans se poser de questions!

Ensuite, on a pris un thé, on a parlé tous les trois. C’était calme, agréable, « gezellig ».

Petit à petit, ses amies ont commencé à téléphoner. Je leur avais envoyé un sms pour dire qu’elle était arrivée à la maison. Elles vont venir à 14 heures pour la voir.

Heure du repas. Finalement, j’ai fait des repas très simples. Rien de compliqué, juste équilibrée et complet. Elle a tout mangé. Sans problème : le poisson, le riz, les brocolis… d’accord, ce n’était pas très lourd. Mais assez pour commencer.

A 14 heures, ses 5 amies sont arrivées. Elles ont parlé ouvertement. Ma fille leur a expliqué sa maladie, expliqué ce qu’elle a vécu les derniers mois et comment elle vit à l’hôpital. Finalement, elles ont un vrai échange. Et je pense qu’elles en étaient toutes très contentes.

Heure du goûter : tartines avec pâte de spéculoos… Elle s’est régalée!!

Le soir, repas normal. Elle remplace les côtés d’agneau par du jambon. Je ne suis pas contente. Mais elle me demande de lui donner la quantité à prendre. Et elle mange sans broncher.
Finalement, épuisée de la journée, elle se couche dans son lit. Espérant passer une bonne nuit. Car à l’hôpital elle dort très mal. Mais à la maison c’est pareil. Elle a mal dormi.

Petit déjeuner le lendemain. Enfin un bol de cruesli avec du lait !!! Cela faisait des mois qu’elle en rêvait !!
On part à trois pour faire les vitrines des grands magasins à Paris.
Sur le retour, on appelle son papa pour qu’il nous ramène un poulet pour le déjeuner.
Elle commence à stresser… Veut manger à 12h30. Éventuellement 13 heures.
Mais son papa tarde à rentrer.  Elle est fâchée, lui en veut. L’a déjà appelé et me dit qu’il est de mauvais humeur…  « Pourquoi il n’est pas parti plus tôt de la chasse ».
Finalement il arrive à 13h30.
Ses amies lui on dit la veille qu’elles ne comprenaient pas pourquoi son papa n’était pas là pour sa sortie. Elles lui disent que ce n’est pas normal….
Ma fille m’en parle. Elle me dit que pour elle il n’y avait pas de problème que son papa ne soit pas là. Qu’elle a l’habitude. Mais ses amies ont semé le doute dans sa tête. « Finalement, ce n’est pas normal qu’il ne soit pas là? ».

Je lui réponds qu’elle ne pourra pas changer son papa. Qu’il faut le prendre comme il est. Profiter des moments qu’elle peut passer avec lui à faire des choses qu’elle aime.
Nous déjeunons à quatre. C’est agréable.
On passe l’après midi à décorer le sapin de noël, à écouter la musique, à bricoler dans la maison. Son papa s’est couché après le déjeuner pour se réveiller à 17h30 afin de la ramener à l’hôpital.

C’était un weekend normal. Comme on les connait depuis tellement longtemps.

Elle veut rentrer le weekend prochain. Définitivement cette fois!

Je me couche à 21 heures. Épuisée, mais contente et sereine.

Veille de sortie : la peur, les reproches

décembre 5th, 2009

Journée de vendredi épouvantable. Pour moi, pour elle. D’abord un rendez-vous personnel difficile le matin.
Ensuite le rendez-vous avec ma fille, sa psychologue et son médecin. Elle pleurait quand je suis arrivée. Même avant d’aller en entretien.
D’abord, elle a du changer de chambre. Fini le cocon agréable qu’elle s’était construite. Fin la possibilité de s’isoler. Fini la salle de bain privative. Elle partage désormais sa chambre avec une fille qui a fait une tentative de suicide. Gentille.
Elle me dit avoir peur du weekend. Elle a tellement envie de rentrer, mais a tellement peur d’être déçue….

On continue la conversation avec les médecins. Il lui dit que ma fille à peur des changements. Mais que la vie est pleine de changements. des petits, comme le changement de chambre. Des grands, comme la séparation de ses parents.

Elle a beaucoup de mal avec ce dernier. Que des contradictions. Elle est d’une part soulagée par ma décision. Mais d’autre part, elle ne veut pas choisir. On ne lui demande pas de choisir…. Mais elle pense que son papa va être malheureux. Et qu’elle doit peut être rester près de lui.
Est-ce qu’elle pense qu’elle va devoir prendre ma place auprès de son papa pour compenser mon absence? Est-ce qu’elle va se sacrifier pour moi?
Elle ne pourra pas s’épanouir, grandir, tant qu’elle voudra compenser pour moi, pour son frère, pour les parents de son papa qui ne sont plus là…

Elle a un trop plein de sentiments, de contradictions. Elle pense qu’elle doit faire des choix. Mais elle oublie de vivre pour elle.

Après, on parle de sa sortie. Des repas.
Elle a peur de ce que je vais lui préparer. Peur de ne pas manger assez ou de manger trop. Veut que les médecins lui disent à la lettre ce qu’elle peut manger. Elle a peur de maigrir mais aussi peur de grossir.
Elle ne me fait pas confiance pour les repas. Dit que je mange mal. Que je saute des repas, que je grignote, que je ne mange pas équilibré….
Mais moi, je ne suis ni boulimique, ni anorexique, ni malade mentale. Et après tout, je ne vais pas culpabiliser pour ça.
Sur le coup, cela me fait un choc. Pas le fait de mal manger. Mais le fait qu’elle ne me fasse pas confiance. Pourtant, les repas de famille sont toujours équilibrés, je ne fait jamais sauter de repas aux enfants, je leur apprends de ne pas faire comme moi…. D’accord, je ne suis pas le meilleur exemple. Mais tant pis, je suis comme je suis.

Après le rendez-vous, ma fille et moi faisons un tour à l’extérieur. En silence. On n’a rien à se dire. On est toutes les deux tristes. Je quitte l’hôpital en la laissant avec les larmes aux yeux. Elle continue de pleurer.
Du coup, j’ai très peur pour ce weekend. Je la sens encore tellement instable, tellement fragile.

Le jour après, elle me dit que lors de cette promenade, sa copine à essayer de lire son journal intime. Ça a provoqué une énorme crise de colère de la part de ma fille. Finalement, cela a du lui faire du bien… Et elles se sont vite réconciliées.

 

Permission de sortie

décembre 4th, 2009

Ça y est. Elle a la permission de sortir 2 jours ce weekend de l’hôpital pour voir comment ça se passe à la maison. Elleest contente, nous aussi… mais avec un peu d’inquiétude quand même. Elle a peur d’être déçue, peur de vouloir d’avoir envie de revenir à l’hôpital dimanche, peur de ne pas vouloir rentrer définitivement après…

Lundi dernier, le médecin m’a téléphoné pour me proposer un rendez vous vendredi (aujourd’hui) afin d’échanger à propos de cette sortie « test ».
Je lui ai dit que mon mari risquait de ne pas pouvoir s’organiser, mais comme il s’agit de parler « repas », ce n’est pas primordial qu’il soit présent.
Et puis, après tout, mon mari  ne sera pas présent de jeudi à dimanche midi. Il n’aura donc que le repas de dimanche midi à partager avec nous. Chacun sa vie… lui c’est la chasse et le travail.

Notre fille a pris 3 kilos depuis qu’elle est rentrée à l’hôpital. Peu, finalement, quand on tient compte des 2 kilos qu’elle a perdus le weekend avant d’y entrer.
Mais elle mange tous ses plateaux, demande d’en avoir plus, mais on ne lui donne rien de plus. Du coup, elle ne prend plus de poids depuis plus d’une semaine. Cela l’inquiète car elle sait qu’une perte de poids l’empêcherait de rentrer ce weekend. Et l’absence de prise de poids empêche une sortie définitive.
Mais le médecin lui a expliqué que c’est normal qu’elle ne prend pas du poids aussi vite. Et que c’est mieux d’y aller doucement. Pour éviter la boulimie et le risque de tout reperdre rapidement. Il faut que les kilos s’installent doucement et y restent. Tout le contraire de moi!!!!

Mercredi dernier son papa a parlé avec elle. Spontanément. De nos problèmes, de nos décisions. Elle n’en croyait pas ses oreilles. « Papa a parlé vraiment, sans que je lui demande… alléluia!!!! »
Cela lui a fait énormément de bien.
Tant pis que je le pousse à faire des choses dont il a peur et qu’il ne veut pas aborder. Tant pis si je suis la « méchante » qui prend des décisions qui ne sont pas appréciés.
Je sens que les choses bougent et je sais que tout le monde en sortira grandi.

J’ai déjeuné avec ma tante hier qui est graphologue et avait analysé une lettre de ma fille juste avant qu’elle rentre à l’hôpital.
L’écriture était vide. Pas de futur. Que le présent. Qu’ELLE. On voyait la dépression, on sentait sa détresse.
Je lui ai montré une lettre qu’elle a écrite le deuxième jour de son hospitalisation et une autre qu’elle a écrite cette semaine. L’évolution est spectaculaire. Équilibrée,  sociable, très gentille avec les autres… Elle reste très centrée sur elle-même, mais le tout est beaucoup plus solide. Et puis, il y a aussi ce côté égoïste qui lui permettra probablement de s’en sortir dans la vie! C’est tellement rassurant, tellement encourageant.

 

Envie de rentrer

décembre 1st, 2009

Elle va beaucoup mieux, malgré une peur très grande de la sortie.
Proche du poids à atteindre (encore une semaine?), elle ne pense plus avoir de problème pour manger. On met cela en doute, car son discours est très contradictoire.
Elle veut absolument se faire suivre par une nutritionniste avec des menus cadrés, précis pour ne pas faire d’écarts. Le médecin n’aime pas trop ça et je le comprends.

Elle a 3 séances avec la psy par semaine. Depuis qu’elle écrit et qu’elle en parle, ces séances vont beaucoup mieux. Elle est à l’aise avec cette personne car elle dit qu’elle pleure beaucoup. Chose qu’elle n’osait pas faire avec Delphine.

Nous avons parlé beaucoup hier à deux. Je sentais qu’elle voulait dire des choses, même quand son papa était là. Elle s’est mise à pleurer car je lui ai dit qu’on ne ferait probablement pas le goûter de Noel car je ne savais pas où elle allait être ce jour là. Et puis, je n’ai pas trop la tête à ça. J’ai envie de m’entourer d’amis et de gens proches. Je ne veux rien de superficiel.
Elle m’a dit « comment je vais pouvoir guérir et ne plus tenir compte de toi, si toi tu ne le fais pas et ne donnes pas l’exemple »?  Et vlammm, j’ai compris de suite qu’il y avait des choses qui sont sortis avec la psy et qu’elle arrive enfin à mettre les mots dessus.

Elle me raconte qu’une des patientes avec qui elle s’entend très bien veut faire passer un message à son papa… en ayant fait une tentative de suicide. Maintenant, elle n’ose plus sourire quand il vient, car si elle donne l’impression d’aller mieux, il est de suite rassuré et lui dit d’être content de ses progrès. Et rien de change. Il faut donc rester malade, rester dans la dépression, pour montrer qu’il faut un changement.
Ma fille a voulu expliquer cette histoire à son père, mais elle n’a pas pu aller jusqu’au bout. Mais elle dit qu’elle ressent exactement la même chose que sa copine.

« On crie au secours ». On a besoin d’aide. On veut faire passer un message mais on n’arrive pas à se faire entendre avec des mots, on le fait donc avec des gestes. Finalement, l’anorexie ou les tentatives de suicide, c’est très proche. Et je comprends la détresse de ma copine … ».

Je sens qu’elle veut faire passer des messages. Qu’elle a besoin de SAVOIR. Je lui demande si elle attend une décision de ma part. On se comprend. De suite. Elle me dit qu’elle en a besoin. Elle veut savoir. Elle n’arrive pas à grandir. Elle me voit malheureuse et cela l’empêche de s’épanouir. Elle ne veut plus de cette vie de famille qui n’en est pas vraiment une.
Je lui dis la vérité. Lui dis qu’on a pris une décision.
Elle pleure. Me dit « merci maman, merci… c’est tout ce que j’avais besoin d’entendre ».

Je n’ai pas besoin de décrire la suite, les échanges. Je sais qu’on va avancer et que ma fille va guérir.
Je pense qu’elle va faire des progrès cette semaine. Et peut être que le weekend prochain, elle pourra rentrer une journée à la maison pour « tester » la sortie.
On s’est quitté avec un grand sourire. Pour la première fois, elle n’a pas eu besoin de me serrer longtemps dans les bras. N’a pas eu besoin de dire que ça allait être difficile. Elle m’a juste dit qu’elle n’allait pas manquer de sujets de discussion avec sa psy
Et qu’elle avait hâte d’aller jouer aux cartes avec les infirmières et les autres patients. Et qu’elle a hâte de rentrer.
Je l’ai sentie apaisée, beaucoup plus sereine.

 

Entendre ce qu’on n’a pas envie d’entendre

 

Les médecins nous poussent à réagir, à faire des choses.
A un moment, Delphine m’a dit lors d’un rendez-vous avec ma fille qu’il fallait un cadre à ma fille. Qu’elle a perdu les repérés et qu’il n’y a plus du tout de cadre. Qu’elle vit à l’extérieur de la « maison ». Elle me dit qu’il est important que je prenne une décision. Pour moi. Pour que ma fille puisse retrouver se repères.
Sur le coup, je lui en ai voulue beaucoup. Pour qui se prend-elle de me dire ce genre de choses? Elle ne connait pas mon histoire, ne sais pas ce que je vis. Et pourquoi dire cela devant ma fille?
J’en ai parlé avec ma fille dimanche. Elle m’a dit qu’elle avait été tellement contente que Delphine m’ai dit cela. C’était la première fois que quelqu’un  exprimait ce qu’elle ressentait vraiment. C’était vraiment les mots qu’elle voulait qu’on me dise.

Hier, le Dr m’a dit qu’il y a un problème de communication entre ma fille et son père. Qu’à part la « pluie et le beau temps » les échanges n’allaient pas beaucoup plus loin. J’en ai fait part à mon mari. Il a mal réagi au premier coup. Comme moi ci dessus.
Il ne comprend pas. Mais c’est dit, et il est important d’y réflechir.
Le médecin lui a également dit qu’il fallait qu’il parle de notre décision avec notre fille. Ce sera une discussion plus profonde… J’espère.