L’escargot et le passé idéalisé

octobre 27th, 2009

Elle se sent comme un escargot.

Elle est contente quand il fait mauvais dehors, quand il pleut. Car dans ce cas on va faire des choses à l’intérieur. C’est « gezellig » (traduisez « agréable, chaleureux »), comme quand on est à Réquista.

« Quand on était petit on faisait toujours du bricolage quand il faisait mauvais ».

Elle a des souvenirs, mais elle idéalise ces souvenirs.

Quand je lui dis « qu’on allait souvent là ou là quand ils étaient petits », elle me demande pourquoi on ne le fait plus. Je lui dis qu’on ne fait pas forcément toujours les mêmes choses, qu’on évolue dans la vie, qu’à chaque âge on fait des choses différentes…

Elle a envie de revenir en arrière. Elle pense que c’était mieux, que tout était plus doux, plus beau.

C’est sa façon de dire qu’elle ne veut pas grandir. Qu’elle veut rester la petite fille qu’elle était?
Tout est idéalisé, tout est vu avec une impression que c’était mieux avant…….

 

J’ai fait analyser son écriture par une tante graphologue.

On retrouvela dépression. Danssa vie, il n’y a qu’elle, il n’y a que le quotidien. Aucune envie, aucune créativité, aucune ambition. Rien. C’est le vide autour d’elle et tout tourne autour de son personnage…..

Il semble que c’est exactement ça,  sa maladie. Une sorte d’égocentrisme poussé à l’extrême, un profond mal-être, aucune perspective, aucune envie…..

Ceci ne veut pas dire que c’est sa personnalité. C’est juste que pour l’instant elle est profondément ancrée dans sa maladie…..

Quand je lui dis qu’elle fait comme les escargots, elle le confirme. Elle rentre sous sa carapace et se trouve bien enroulée à l’intérieur, bien au chaud. Quand il fait beau, elle se sent obligé de faire des choses, de sortir. Et ça ne lui plait pas du tout !….

Elle retient depuis son enfance des sentiments, des angoisses.  Ils sont refoulés, cachés. Elle ne les a jamais exprimés. Elle a juste tout absorbé.
Aujourd’hui c’est trop.

Et sa seule façon de réagir c’est de ne plus manger. C’est sa façon de crier « au secours ». Car elle ne peut pas exprimer ce qu’elle ressent.
Elle fait des crises au moment où elle n’arrive plus à se contrôler, à contrôler ses émotions. Il faut que ça explose, que ça sorte d’elle.

Avec son papa, les relations sont très tendues.

Jeudi dernier nous sommes allés manger avec mes parents au restaurant pour mon anniversaire.
Toute l’après midi elle a eu peur de sa réaction vis à vis de son papa quand il rentrera le soir. Elle m’a dit qu’elle ne lui parlerait pas. Qu’elle espérait qu’il ne l’énerve pas.

J’ai beau lui expliquer que son papa l’aime, qu’il fait ce qu’il peut pour elle, qu’il faudrait lui parler, lui dire ce qu’elle a sur le cœur.
Elle me répond que ce ne vaut pas la peine, qu’il ne peut pas comprendre, qu’il a toujours raison, qu’il s’énerve et est vexé quand elle lui dit ce qu’elle pense. Qu’il arrive à la faire pleurer, à la rendre hystérique par ses mots, ses remarques.

Je la laisse parler, s’exprimer. Mais je ne donne pas d’avis.
Demain, elle dira probablement la même chose de moi. Quand elle sera énervée avec moi, elle se tournera vers son papa.

Le soir de mon anniversaire, mon mari est arrivé avec un magnifique cadeau et un bouquet de fleurs accompagné d’un très gentil petit mot.
Elle n’a pas réagi de suite, ne lui a pas adressé la parole. Mais  quelques minutes après, elle s’est levée et s’est lancé dans les bras de son papa.

Elle a tellement mal entre l’amour etla haine. C’est l’adolescence amplifiée par la maladie… ou le contraire.