Ma boîte blanche

janvier 3rd, 2011

Extrait d’un crise de ma fille (1 janvier 2011).

Entre les larmes, les hurlements, les cris de détresse, elle prononce quelques phrases. Il fait tenir compte que ces phrases sont dites pendant une crise, donc où elle ne maîtrise plus rien.Où on à l’impression que c’est uniquement sa maladie qui parle. Après la crise, le calme revient. Elle est détendue, comme si elle avait besoin d’enlever le bouchon par moment pour faire exploser le trop plein d’anxiété.

Je ne veux plus avoir mal.
Je veux pouvoir manger, m’amuser, danse comme je veux, et pas comme les autres veulent que je fasse.
Je veux partir dans un monde où tout est blanc. Tout blanc, toute seule. Un autre monde où je peux manger, m’amuser comme je veux.
Je prends du Lexomil, je dors. Au moins, quand je dors je ne pense plus à rien. Je veux tout le temps dormir. Je veux m’endormir et plus me réveiller. Je veux un monde imaginaire. Je veux m’endormir pour ne plus souffrir.
Je veux tout recommencer. Je veux renaitre. Oublier toute cette vie que je déteste. Cette vie où je souffre tant.
Pourquoi moi? Pourquoi? Qu’est ce que j’ai fait pour mériter ça?
Je veux que ça s’arrête. Je veux recommencer dans un autre monde où tout est doux, où tout est blanc.
Je ne veux plus souffrir. J’en ai marre d’avoir si mal.
Je ne sais pas quoi faire. Je ne sais pas.
Je ne sais pas qui je suis.
Je ne sais pas ce qui me plairait.
Je ne connaît pas le plaisir.
Je suis malheureuse.

 

Je veux un monde où tout est doux, tout est blanc. Je veux être toute seule. Pour ne pas souffrir. pour ne pas aimer.
Je me déteste. Je suis un fille nulle. Je suis une amie nulle. Je suis affreuse. Je suis horrible.
J’ai besoin de savoir ce qu’il se passe. Qu’est ce qu’il s’est passé? Je veux savoir. je veux savoir. Je veux savoir.
Je n’en peux plus de souffrir. Qu’est ce que j’ai fait? Pourquoi moi?
Pourquoi je souffre autant?
Je veux manger comme je veux.
Je veux m’amuser comme je veux.
Je veux pourvoir faire tout ce que je veux.
Je ne peux pas.
Je n’en peut plus.
Tant de souffrance.

Je veux ma boîte blanche. Je veux un boîte blanche dans laquelle je suis protégé. Dans laquelle je suis bien. Une boîte toute seule, sans personne, sans émotions, sans souffrance.
Je veux un vie plate. Sans qu’on m’aime, sans que j’aime. Où je peux faire ce que je veux. Où je n’ai pas mal.
Ma boîte blanche. Je veux ma boîte blanche.

Je veux manger. Je ne pense qu’à ça. C’est une obsession. Je veux faire des crises de boulimie. Parce qu’il faut de l’excès. Je sais qu’il faut manger normalement. Mais je ne peux pas. Je n’ai pas le droit.

Les vacances : échange avec nutritionniste

août 9th, 2010

Email à la Nutritionniste :

Bonjour

Merci beaucoup pour ce compte rendu. Elle vient de partir au Maroc et j’espère que tout se passera bien. Elle sera avec une amie à moi chez qui nous étions juste avant son hospitalisation et qui connait donc son problème. J’ai demandé à son papa de ne surtout pas se mêler des repas afin qu’elle ne fasse pas de blocage par rapport à cela.
Elle a effectivement arrêté ses crises de boulimie depuis que je me suis beaucoup fâché et que je lui ai dit que dans cet état je la ramène à l’hôpital. Je lui ai fait la liste des dangers et je pense qu’elle a du prendre peur car depuis c’est terminé (mais on ne sait jamais pour combien de temps…). Il me semble donc important que je lui impose des limites même si cela lui fait de la peine et qu’elle pense que je ne l’aime plus (!).
Je ne suis toutefois pas d’accord d’accepter qu’elle stabilise au poids actuel. Elle a demandé cela à 51 kilos, à 50, à 49, à 48 et maintenant à 47… C’est trop bas et on sait tous qu’on se fait manipuler (même si ce n’est pas volontaire et conscient). Enfin, on verra à son retour….
Entre temps elle est assez rassuré de savoir qu’elle peut vous appeler si nécessaire. C’est très gentil et j’apprécie énormément votre aide.
Réponse de la Nutritionniste :
J’ai donc vu votre fille cette après-midi qui effectivement va mieux psychologiquement (elle exprime notamment mieux ce qu’elle ressent, est plus lucide sur ses difficultés et accepte plus facilement certains repas ou aliments) mais le trouble alimentaire est très présent avec des peurs et des angoisses autour de la prise de poids qui la conduisent – et c’est plus fort qu’elle – à se restreindre et ensuite à faire une crise de boulimie. 

Malheureusement ce n’est pas une question de volonté mais bien de blocage psychologique. Son poids est très bas et l’objectif que je lui ai fixé, compte tenu de la période à venir, est au moins de ne pas perdre de poids et d’éviter les crises et tout cela en respectant au mieux la répartition alimentaire. 

Elle m’a dit que vous lui aviez demandé d’atteindre les 48 kilos. Je ne suis pas certaine que ce soit tout à fait réalisable en 8 jours et avec Marrakech au milieu. En revanche que vous ne cédiez pas, que vous marquiez vos limites fermement mais avec douceur est effectivement nécessaire.

Je lui ai donné les conseils dont elle avait besoin pour faire au mieux à Marrakech. Elle peut m’appeler dès qu’elle a besoin de là-bas et doit quoiqu’il en soit me téléphoner à son retour le 17 avant de repartir avec vous en Floride.

Nous allons la cadrer avec Pascale et avec votre aide structurante et, à son retour de vacances, la conduire peu à peu à lâcher ses peurs.

N’hésitez pas à m’appeler si vous le souhaitez. Passez un excellent week-end…..

Email à la Nutritionniste :

Merci pour votre retour. J’ai quelques soucis avec ma fille cependant car elle part à Marrakech semaine prochaine avec son père et ensuite avec moi aux Etats Unis. Même si globalement elle va mieux psychologiquement, je suis très inquiète à propos de son poids qui reste beaucoup trop bas. J’ai peur que les vacances ne vont qu’emprirer cela et je lui ai dit que en dessous en 48 kilos je ne suis pas prête de l’emmener en Floride. Je sais très bien que je n’ai pas le droit de lui faire ce chantage mais je ne veux pas prendre le risque que cela baisse encore davantage. Elle mange essentiellement des salades et je refuse de faire des repas spéciaux pour elle… c’est un retour en arrière que je ne veux pas revivre. Elle le prend évidement assez mal et cela provoque quelques colères. Mais ces disputes ou colères sont plutot rassurantes car cela montre qu’elle réagit ! Et qu’elle ne reste pas dans son coin à pleurer sans s’exprimer.….

J’ai décidé d’être un peu moins conciliante avec elle car elle pense tout pouvoir obtenir de ma part. C’est un peu comme si je suis la pompe à essence qui l’alimente et qu’elle vit sur mon énergie …. ce qui me prive d’en avoir encore pour moi..

Ces quelques phrases en vrac pour vous donner mon sentiment. Merci à vous et à Pascale Z. qui êtes formidables pour elle!!

Bien cordialement.

« Je suis moche, nulle, bête et stupide … » Mais elle passe son bac Français !

juillet 6th, 2010

30 juin 2010 :
Elle a passé son oral de Français. Cela s’est très bien passé. Elle était tranquille et rassurée car elle connaissait très bien ses textes. L’examinatrice était agréable et je suis tellement fière qu’elle a pu le faire. Les professeurs à la maison ont été formidables. Ils l’ont tous encouragé. Tous sont content d’elle. Et tous sont convaincus qu’elle a largement le niveau pour passer en terminale.

On a reçu son bulletin. Il manque toutes les notes dans les matières scientifiques, car les notes des contrôles étaient mauvaises. Les professeurs ont jugés qu’elles ne reflétaient pas le niveau de ma fille. Et ils ont préférés ne rien indiquer. Ce qui est plutôt positif.

Hier, le 5 juillet, j’ai eu rdv à son lycée avec la directrice. Elle me propose d’abord de faire passer notre fille en terminale L. Je sais qu’elle ne le voudra pas et on laisse tomber cette option. La directrice m’assure qu’elle a confiance dans les capacités de notre fille et qu’elle la prendra en terminale S option Math. Elle propose de lui faire passer des évaluations sans pression (elle peut même les faire à la maison) en septembre dans les matières où elle n’a pas de notes. Cela permettra à elle de voir où elle se situe et de compléter son bulletin du troisième trimestre de cette année. Ce qui lui permettra d’avoir un bon dossier pour les inscriptions après Bac. Le lycée a envie de la garder, mais la directrice peut également comprendre qu’il est difficile pour notre fille de réintégrer le lycée dans une classe de 35 élèves à la rentrée, après avoir eu des cours particuliers.
Le rdv était donc très positif et cela devrait rassurer notre fille au niveau de ses capacités. Cela prouve que les gens ont confiance en elle.

 

On attend les résultats du bac français pour prendre un décision, mais je pense qu’elle s’oriente vers Montessori car l’effectif réduit et le côté très humain de cette école la rassure. On a eu rdv avec la directrice de cet établissement la semaine dernière et elle en est sortie assez contente. Je pense que c’est la meilleure solution pour elle et que cela sera moins stressant que de revenir dans le lycée où il y a trop de pression et trop de « vécu ».

Les crises de boulimie s’aggravent malgré les nouveaux médicaments. Toutefois, ces crises ne sont pus systématiquement accompagnées d’automutilation ou d’hystérie.
Les anxiolytiques la font mieux dormir et on arrive à communiquer plus facilement avant, pendant ou après les crises.

Vendredi 2 juillet : 2 crises de boulimie (matin et gouter). Elle m’a téléphoné après pour m’en informer. Elle s’est sentie très, très mal. Il devient difficile de la laisser seule au moments de repas et il faut que je m’organise pour qu’elle le soit le moins possible.

Samedi 3 juillet : elle stresse la matin car déjeuner prévu avec son frère et son papa. Elle pleure car elle souffre de la relation entre son frère et son père qui est très médiocre.  Je la calme. Quand son papa arrive on décide d’aller déjeuner tous les 4 ensemble. C’est tranquille et les enfants semblent contents. Ensuite, elle passe l’après midi avec son père à paris et revient le soir.

Dimanche 4 juillet : Journée bien. On a fait la gym à la maison avec des amies et ma coach. cela fait du bien d’avoir du monde à la maison!
Le soir, grosse crise entre 21 et 24 heures. Hurlements, pleurs…. suite à un crise de boulimie pendant le gouter (alors que j’étais dans  le jardin!!). Elle a peur de partir à Malte jeudi. Elle a peur que sa copine la laisse tomber pendant les vacances. Qu’elle se sente toute seule. Elle doute d’elle même. Se sent moche, grosse, maigre, stupide, inintéressante …. Ne voit pas comment les autres puissent s’intéresser à elle.

Elle a besoin d’être rassurée en permanence. Mais je ne peux pas lui cacher que sa copine n’est pas sa babysit pendant les vacances… Il faut qu’elle accepte que chacun à sa vie.

Lundi 5 juillet : elle me rejoins pour déjeuner avec moi car ne peut pas rester seule à la maison. Le soir, son frère veut aller dormir chez un copain mais moi j’avais prévu une soirée avec une amie. Finalement, je sens que je ne peux pas la laisser et je ne peux pas demander à son frère de la surveiller. Je reste donc avec elle et on mange ensemble. Cela s’est bien passé. Une journée sans crise !

Mardi 6 juillet : j’ai quitté la maison à 9 heures. Elle a pris son petit déjeuner seule. Je l’appelle à 10 heures pour vérifier que tout va bien. Elle me dit que oui.
Elle me rappelle 30 minutes plus tard pour me dire qu’elle était en pleine crise de boulimie quand je l’ai téléphoné…. Mais heureusement elle m’appelle pour le dire. Et elle me décrit ce qu’elle a pris. Je la rassure et lui demande de me rejoindre pour déjeuner ou d’appeler quelqu’un d’autre.  Elle ne peut pas rester seule.

Ce soir, sa copine arrive de Tours car elles partent ensemble à Malte jeudi. Ca fera du bien car si elle est avec quelqu’un, elle ne peut pas se laisser aller.
J’espère que je pourrais aller à un barbecue chez des amis ce soir….

Enchaînement de rendez-vous

juin 24th, 2010

Lundi 21 juin :

Elle passe son Bac écrit de Français. Ca s’est bien passé et elle est resté les 4 heures. Rassurée car elle connaissait le sujet. Pour le résultat, on verra. Mais ça ne peut pas être catastrophique.
Déprimé l’après midi car ses amies ne lui ont pas demandé comment son bac s’était passé. Trop occupées par leurs propres affaires. Elle se sent rejetée.

Mardi 22 juin :

Crise très importante le soir. Provoqué par le fait qu’elle a vu que j’allais préparer des asperges pour le diner.
Impossible de la calmer pendant plusieurs heures.
Elle fini par manger. Mais revient en pleurs à minuit.

Mercredi 23 juin :

Rendez-vous psychologue. En pleurs. Crise dans la voiture en y allant. Hospitalisation indispensable selon psychologue. Objection de ma fille. Changement de traitement antidepresseur necessaire rapidement. Faut également rapidement trouver un psychiatre compétent.
Elle part plus calme. Refuse l’hôpital.

 

L’après midi : rendez-vous avec la psychiatre qui ne comprend rien. Mais on obtient le changement de médicaments. Elle a arrêté le Prozac depuis quelques jours et on sent que les crises s’enchaînent. Maintenant un autre antidépresseur combiné avec des anxiolytiques. Je pense que c’est le dernier rdv avec cette psychiatre qui est à milles lieux de comprendre cette maladie.
J’ai téléphoné à pleins de psychiatres sur paris. Ma fille a même rappelé sa première psy, Delphine. Aucun retour. Tous sont surbookés….
Elle a bien travaillé sur son Français toute la journée. Bien avancé et moins stressée.

Jeudi 24 juin :

J’ai eu les coordonnées d’un psychiatre à la clinique de Garches. Clinique psychiatrique. Le médecin part en vacances mais me donne les coordonnées d’un confrère au même endroit. J’attends son appel.
Cet après midi rendez-vous à l’hopital de Poissy avec son médecin.
Elle très peur car elle sait qu’il veut l’hospitaliser. Mais elle doit passer son bac oral le 30 et ne veut pas le rater.
Elle a bien dormi cette nuit. L’anxiolytique l’a calmé. Elle est tranquille.

Une crise d’anorexie. Les pleurs. Le désespoir

juin 21st, 2010

Une crise d’anorexie – c’est bien plus que des pleurs.

C’est l’expression d’un désespoir profond qui ne peut sortir qu’avec des hurlements, des pleurs et qui souvent mène à l’automutilation.  C’est difficile à entendre, difficile à comprendre. mais il est important de savoir ce que c’est vraiment….

Les crises de boulimie s’enchaînent

juin 7th, 2010

C’était plus que prévisible : la boulimie après l’anorexie. Ou plutôt : les deux ensemble. Voilà où on en est aujourd’hui.
Elle se prive pendant quelques jours. Et puis, elle se jette sur la nourriture pour combler le manque. Suivi des vomissements et de la honte. De la peur. Du désespoir.
Ces crises surviennent uniquement quand elle est seule. Pas quand je suis là. Maintenant, elle m’appelle pour me dire ce qu’il s’est passé. Pour pleurer et se faire consoler.

Son coeur lui fait mal. Il pleure. Elle est malheureuse.

 

Vendredi soir, elle et son frère étaient prêts pour aller chez leur papa. Mais au dernier moment elle a craqué. Trop peur d’aller chez son père. Trop peur d’être avec lui. Trop peur qu’il n’arrive pas à gérer les repas. Elle culpabilise de se sentir comme ça. Elle veut passer du temps avec son frère et son papa, mais elle n’arrive pas à y aller. Il y a trop de tensions quand ils sont tous les 3. Pourtant, leur papa fait tout pour que ce se passe bien. Il avait acheté des sushis car il sait qu’elle mange cela. Il accueille une amie à elle samedi soir. Mais elle ne veut pas. Elle veut manger avec moi. Se calmer.
Nous décidons qu’elle reste à la maison jusqu’au samedi matin. Elle se calme. Mais reste ce sentiment de culpabilité de priver son frère d’une soirée avec son père. Mais son frère est content…. Nous lui expliquons que ce n’est pas à elle de gérer la relation entre son frère et son père. Que son frère est assez grand pour savoir ce qu’il veut (faire du vélo avec ses copains, de préférence tous le weekend, jour et nuit!). Si il veut aller chez son papa, il le dit.  Mais elle se sent responsable.

Finalement ma soirée tranquille de vendredi soir se transforme en soirée de Rumikub et conversations avec ma fille…. Sympa mais j’avais prévue de passer la soirée toute seule.
Samedi je l’emmène chez l’ostéopathe car elle a toujours mal au dos. Son papa nous rejoint au cabinet et récupère les deux enfants pour le déjeuner.
Ensuite, mon fils revient à la maison et ma fille passe l’après midi avec son papa. Le soir, son amie la rejoint et elles passent une soirée au restaurant à deux + sortie dans une boite de nuit (le Queen…) à Paris.  J’en suis pas ravie car j’estime que ce n’est pas trop de leur âge, mais son papa a prévue le propriétaire pour qu’elles soient accueillies et surveillées.  Elles ont passé une soirée mémorable!!

Le lendemain, journée avec son papa. Mais quand je la récupère en fin de journée, c’est de nouveau une fille déprimée qui arrive à la maison.

 

lle recommence à pleurer. Se dit malheureuse. Elle n’en peut plus. A l’impression de ne plus savoir qui elle est. Dit qu’elle ne comprend pas son papa. Et qu’il ne la comprend pas. Que tout est embrouillé dans son tête. Qu’elle se pose mille questions et qu’elle ne s’en sort pas. Elle ne se sent pas « chez elle » quand elle est chez lui.
Pendant une heure, elle pleure, elle se tord dans tous les sens.
Et puis, elle se calme… jusqu’au moment du repas.
J’ai préparé des pâtes. Je sais que ça va être difficile, mais il faut qu’elle mange des féculents.  En voyant son assiette, elle recommence à pleurer. Elle dit de suite qu’elle ne peut pas manger ça. Je lui donne de la soupe aux asperges, mais demande de manger quelques pâtes. Elle est désespéré et se rend compte qu’il faut marche arrière.
Elle a peur de grossir en mangeant ça et a besoin d’entendre que cela ne la fera pas grossir. Je la rassure et lui dit que cela lui permet uniquement de donner à son corps ce sont elle a besoin.
Finalement, elle mange les pâtes. Et est redevenue calme. Après le repas, je fais un jeu de société avec elle pour l’occuper.

Pour les médicaments, on réduit le Prozac à un demi comprimé par jour. Et elle peut prendre un anxiolytique au moment des angoisses. J’ai très peur de ce changement, mais je pense qu’elle doit changer d’antidépresseur. Et pour cela, il faut arrêter le Prozac d’abord.

Ma maman m’a donné une piste au niveau purement hormonal. Il a été prouvé que l’anorexie a une base endocrinologique et que le traitement avec un supplément d’hormones pourrait être bénéfique. Le taux de cortisol dans le sang d’une personne souffrant d’anorexie est plus élevé que la normale. Ce niveau élevé est du à la restriction alimentaire, le niveau excessif d’exercice physique, la purge (vomissements) et l’automutilation. Il semblerait que ces comportements peuvent être une façon de compenser un problème endocrinologique caché : l’insuffisance corticosurrénale (andreocortical) qui inclus une déficience de cortisol.
Bon, c’est un langage assez technique et il faut continuer les recherches. Je vais vérifier les prises de sang faites afin de voir si ce taux de cortisol a été vérifié. Mais comme elle a été vu par une endocrinologue l’année dernière, je suppose (!) que cela a été fait.

 

Une soirée ordinaire

juin 1st, 2010

Hier soir je suis rentrée vers 19 heures.
Ma fille était allongé dans le fauteuil devant la télévision.  Généralement elle est contente de me voir et elle raconte sa journée. Mais là, comme cela arrive plusieurs fois par semaine, elle est renfermée. Je sais que quelque chose s’est passé mais je n’ai pas le courage de l’aborder immédiatement. Je prends d’abord le temps de voir aussi mon fils. De prendre un verre de vin. Et de me préparer mentalement à une soirée qui, je sens,  va encore être difficile.

Je vais la voir et lui demande comment elle va. Elle bouge un peu la tête mais on voit que ça ne va pas. Je lui demande si elle a fait une crise de boulimie. Elle me dit que oui. Au goûter. Elle a commencé à manger un petit pain au raisins, et ensuite elle ne pouvait plus arrêter. Mais elle ne veut pas me dire ce qu’elle a mangé. C’est trop difficile d’en parler. Elle a trop honte.
Elle me demande de la laisser toute seule. Je quitte le salon et je vais préparer le diner : tarte aux tomates et salade verte avec parmesan. Je sais que cela ne lui conviendra pas. Mais je sais aussi que rien ne lui conviendra ce soir….

J’appelle les enfants pour diner. Elle entre dans la cuisine. Regarde son assiette. Dit non avec la tête. Enlève la tarte de son assiette. Et finalement elle remonte dans sa chambre. Sans rien dire, sans rien manger.
Je la laisse partir et je mange avec son frère. Il commence à avoir l’habitude de ce type de réactions. On discute donc tranquillement à deux. Après le repas j’entends ma fille pleurer dans sa chambre. Des pleurs forts, on sent sa souffrance, sa douleur.
Je vais la voir. Elle ne me repousse pas. Mais elle continue à pleurer. A dire qu’elle n’en peut plus. Qu’elle a tellement honte. Qu’elle a tellement mal.

 

Je la sert dans les bras et je me revois 16 ans en arrière.
Quand elle était bébé, elle pleurait souvent les premières semaines. Je passais des nuits à côté de son berceau pour la calmer en lui caressant le dos, en lui parlant doucement. Elle avait faim, elle avait mal au ventre. L’allaitement était difficile.
J’étais fatigué. Je ne voulais qu’une seule chose : qu’elle s’endorme Pour que je puisse dormir.
Aujourd’hui j’ai ce même sentiment, cette même envie. Faire de sorte qu’elle arrête de pleurer, qu’elle arrête d’avoir mal.

Finalement, elle se calme. Je lui demande de me parler de sa crise de boulimie. Lui explique que j’ai besoin de savoir afin de pouvoir l’aider. De pouvoir prévoir.

Elle me montre la feuille sur laquelle elle note tout ce qu’elle mange. C’est la nutritionniste qui lui a demandé de le faire. Effectivement, elle a mangé de la pâte à tartiner, des biscuits, des biscottes…. Énormément à ses yeux,  mais franchement, pour quelqu’un de « normal » cela n’est pas vraiment exceptionnel. Elle n’a mangé que des choses qu’elle aime. Pas n’importe quoi, comme cela peut être le cas dans les crises de boulimie.
Je lui ai donc dit que j’enlèverais ces aliments pour qu’elle ne soit pas tentée. Je l’ai fait de suite et cela l’a rassuré.
Ensuite je lui ai préparé son repas : filets de poulet, salade verte, yaourt.
Trop peu. Beaucoup trop peu. Mais au moins, elle reste en vie avec ça.

Elle ne veux pas se coucher tôt. Donc elle reste avec moi toute la soirée. Et honnêtement, je n’ai qu’une envie : c’est d’être seule à la fin de la journée.

 

Aujourd’hui, elle a quelques cours particuliers à la maison. Mais comme il y a un trou entre 10 et 14 heures, je lui ai demandé d’aller au centre commercial pour aller chercher quelques affaires dont j’ai besoin.
Jusqu’à maintenant j’ai évité de lui demander ce type de choses car j’estime que ce n’est pas à elle e faire des courses etc.
Mais finalement, elle a presque 17 ans, elle ne va pas à l’école, elle s’ennuie et  elle ne veut rien faire pour elle . Malgré toutes les idées que je lui donne (l’auto-école, cours d’examen d’anglais, cours de cuisine, expositions d’art ….), rien ne l’intéresse.
Par contre, faire les courses et m’aider ne la dérange pas. Donc, je vais l’occuper comme ça pendant quelque temps pour voir ce que ça donne.

Voilà une soirée comme je les vis 3 fois par semaine en moyenne. C’est épuisant et je n’ai honte de le dire.
Ce soir elle sera probablement très bien.

Et maintenant, je vais appeler son médecin pour lui faire part de toutes ses évolutions et lui demander si il n’existe pas des groupe de paroles pour les patientes comme elle dans notre coin. Comme les Weight Watchers ou les AA …

Changement d’équipe

mai 31st, 2010

J’ai l’impression qu’on est revenu 6 mois en arrière… Malgré tout ce qu’on a fait, tout ce qu’on a vécu, on est presque de retour au point 0.
Après l’hospitalisation elle aurait dû être mieux suivi. Elle aurait dû être encadrée par une nutritionniste, une psychologue, une psychiatre compétente… Mais le médecin de Poissy qui a fait beaucoup de bien pour elle lors de son hospitalisation n’a pas estimé que cela était nécessaire. Et ne nous a pas donné les armes pour continuer la bataille.

On a donc repris les choses en main nous mêmes. Elle a vu une deuxième psychologue qui est spécialisée dans les TCA (anorexie et boulimie) et elle a de suite accrochée. En sortant du premier rendez-vous elle m’a dit que ces 10 minutes lui avaient fait plus de bien que les 4 mois avec sa psychiatre…. Qui est absolument nulle et incompétente à mes yeux!!
Donc, depuis la semaine dernière elle voit cette psychologue pendant 1 heure par semaine, la nutritionniste également pendant une heure. Et puis il reste la psychiatre pour les médicaments. Mais je pense que cela va également changer très rapidement car le Prozac me fait trop peur. Et puis, cette psychiatre ne l’aide pas du tout, ne répond pas à ses questions et est donc totalement inutile.

Les crises, elle continue à les faire régulièrement. Dès qu’elle n’a pas toute mon attention. Dès que je suis un peu fatigué. Dès qu’il y a un changement dans le programme.
Elle se coupe le poignet avec le rasoir, avec les dents, avec tout ce qu’elle a sous la main. Elle se tire les cheveux de la tête. Elle se roule parterre ou reste toute la journée dans son lit.
Elle m’épuise. Et même si c’est dur à dire, je suis soulagé quand elle passe un peu de temps ailleurs. Quand elle va chez son papa pour le weekend.  C’est le seul moment où j’arrive à soulager un peu ce poids qui me pèse sur le cœur.

 

J’en dévient complètement asociale. Je n’ai pas envie de sortir, pas envie de voir du monde, pas envie de recevoir trop de monde. Chaque fois qu’il y a des gens de l’extérieur avec nous, cela se passe mal. Que se soit la famille ou les amis. Je n’arrive pas à me concentrer sur les autres quand elle est dans le coin. Elle me demande toute l’attention et il est impossible de donner mon attention à autre chose que ma fille, mon fils et le quotidien.

Vendredi elle a fait deux crises de boulimie. Une le matin, une le soir; Elle a mangé tout ce qu’elle avait sous la main. Et vomi tout ce qu’il y avait dans son ventre.
Elle ne faisait pratiquement pas cela auparavant. Maintenant cela arrive de plus en plus souvent. Il parait que c’est normal. Que dans cette maladie on passe souvent de l’anorexie à la boulimie. Car à force de se priver, il y a des moments où tous les boulons sautent. Et qu’elle ne contrôle plus rien. Après c’est pire. Car elle s’en veut d’avoir été aussi faible. De ne pas avoir réussi à se contrôler. Et elle se prive encore plus. C’est un cercle vicieux….

Le poids ne change pas. Toujours en dessous des 50 kilos. Toujours trop maigre. Mais je suis moins inquiète sur sa nourriture car elle mange sainement. Peu mais bien.

Avec son papa les choses se passent bien. Entre nous aussi. On est beaucoup plus calme et on se parle plusieurs fois par jour par téléphone. C’est plus serein et c’est mieux pour tout le monde. Les chemises ne viennent plus à la maison pour le nettoyage donc même ça s’est résolu sans que j’en parle… Les choses se mettent en place petit à petit.
Demain soir ma fille va passer la soirée chez lui. Et le weekend prochain elle devrait y aller avec une amie. Je vais souffler un peu.
Et mon fils: il va très bien. Prend beaucoup d’assurance. A grandi de 15 cm en 1 an et devient un vrai petit homme. Et il est content de ne pas avoir d’obligation d’aller voir son papa. Du coup, il est heureux quand il y va….comme quoi….

Bonjour Tristesse …

mai 12th, 2010

Triste… tellement triste…. Voilà comment se sent ma fille.
Elle ne veut plus vivre. Elle vit juste pour ne pas faire du mal aux autres. A moi, à son frère. C’est pour nous qu’elle dit tenir le coup. Mais c’est tellement difficile.
Elle est dans un tunnel et tout est noir. Elle ne voit pas la fin. Et même si on dit qu’à la fin du tunnel il y a une sortie, elle répond « pas toujours. Parfois, le tunnel peut s’écrouler ».

Elle a un poids qui pèse sur sa tête, sur ses épaules. Un poids écrasant. Ca lui fait mal à la tête. Elle voudrait en finir avec ce mal. Et quand elle est « en crise », je sais qu’elle en est capable.

On a eu les couteaux. Pendant les dernières vacances à Cannes, c’était le rasoir sur les poignets. C’est superficiel, mais à chaque fois il y a un peu plus de sang…. Je reste froide dans ces circonstances. Parfois, je lui redonne le couteau, ou le rasoir. Et disant qu’elle a qu’à continuer. Que c’est trop difficile pour moi de regarder ce qu’elle se fait. Alors, elle arrête. Elle pleure, mais elle arrête de se faire mal.

Dimanche dernier, elle a passé sa journée à pleurer. Toute la journée, sans arrêt.
Lundi elle avait un contrôle commun de physique au lycée. Elle a rendu copie blanche….
Ce qui veut dire qu’elle redoublera car elle n’a qu’une seule chance par matière. Tant pis. On savait que la probabilité de redoublement était très grande. Et tellement peu important par rapport au reste.

Elle a des jours où ça va bien. Presque trop bien. Elle est souriante, euphorique. Mais on ne sait jamais quand. Et ça peut changer d’un moment à l’autre.

Nous avons vu une nouvelle psychologue aujourd’hui. Avec qui elle peut avoir un échange. Car la psychiatre ne me semble pas suffisant. Elle ne la voit qu’une demi-heure par semaine et il n’y a aucun échange. Ma fille a besoin qu’on lui parle, qu’on lui donne des conseils, qu’on l’aide tout simplement.
Elle doit réfléchir pour savoir si elle veut revoir cette nouvelle psy. On voit la psychiatre cet après midi et on en parle avec elle également.
Et puis, je veux qu’elle arrête le Prozac. J’entends trop de catastrophes autour de ce médicament. Et ma fille ne semble absolument pas bien réagir à cet antidépresseur.
J’espère que j’arriverai à en parler avec la psy sans qu’elle se vexe! Mais finalement c’est moi qui vois les crises de ma fille. C’est moi qui vois de quoi elle est capable. Et c’est moi qui angoisse à chaque fois que je la laisse seule… en me disant qu’elle ne sera plus là à mon retour.
Donc, les psys, il faudrait quand même qu’ils écoutent un jour.

Nous partons à Bruxelles ce soir. On est contents. Et elle aussi. J’espère que ce sera un weekend où elle ira bien.  Personne ne saura ou ne verra ce que je viens d’écrire. J’espère.

 

Déménagement

avril 13th, 2010

Aujourd’hui mon mari déménage. Aujourd’hui c’est l’anniversaire de mon filleul. Ce soir on va au Moulin Rouge.
Je suis au bureau. Notre fille à la maison avec son cousin qui passe la semaine chez nous.
Elle reparle avec son père depuis jeudi dernier. Enfin.
Elle est contente. Lui aussi je pense.
On a passé le weekend de Pâques à Londres. A trois. C’était bien, mais les enfants étaient difficiles. Exigeants. Distants avec les amis qui nous ont reçus.
Quelques crises de notre fille. Encore. Mais depuis jeudi ça va mieux. Je pense que le contact rétabli avec son père la soulage. Elle peut refaire des projets avec lui. Est contente de pouvoir aller passer du temps à Paris. De sortir et dormir chez lui après.
Pour moi aussi, c’est un soulagement. Je souffrais de cette coupure de contact entre eux.
Le weekend dernier mon mari était à Cannes et j’ai passé les deux jours dans le jardin. Ça me fait du bien.
On parle peu. On se croise. On a peut être tous les deux un peu peur de l’avenir.
Il m’a dit que les enfants emmèneraient ses chemises pour les faire nettoyer à la maison. Une façon de garder un pied à la maison.
Je n’ai rien à dire pour l’instant. On verra comment les choses évoluent.
Difficile aussi de dire comment les enfants se sentent. Finalement, ils voient très peu leur père. Donc ca ne change pas énormément dans leur vie quotidienne.
Pour les vacances de Pâques nous allons à Cannes. Mon mari avec les enfants pendant 4 jours et moi ensuite pendant 5 jours. Histoire de partager ces vacances chacun avec les enfants.
Nous n’avons rien convenu pour la garde des enfants. Ils restent avec moi et pourront aller voir leur père quand ils le veulent. J’espère que cela ne se soldera pas par un plein temps chez moi. Notre fille sera contente d’aller à Paris. Mais notre fils… sans ses vélos, son skate et ses amis?
Et les repas? Notre fille se débrouille très bien quand elle est seule. Mais dès que je dois faire un repas, c’est la dictature. Il faut que je prépare le repas à 12h30 et 19h30 pile. Trop tard, c’est la crise. Elle ne veut pas savoir par avance ce qu’on va manger.
Pourtant le midi, quand elle est seule, elle se débrouille. Le soir aussi. C’est juste quand je suis là que c’est compliqué.
Je sens qu’elle veut me « contrôler ». Pourtant c’est inconscient. C’est insupportable par moments.
Mon mari quitte la maison. 17 années de vie commune s’envolent. Je suis soulagée, triste. Je culpabilise.
J’ai échoué? J’ai gagné? Non, ce n’est rien de tout ça. C’est une tristesse. Beaucoup plus pour les enfants que pour moi. Nous avons cassé leur vie. Brisé leur famille. Brisé les espoirs de se retrouver tous ensemble.
On a raté notre mariage. J’espère qu’on fera mieux pour notre séparation.